Aménagement

L'homme qui aimait les plantes

Jonathan Lefrançois cultive 150 plantes dans son trois et demie. Et chaque fois qu’il publie une photo de monstera ou de pilea, son compte Instagram gagne en popularité.

Un dossier d’Émilie Bilodeau

Aménagement

« J’ai eu un problème de consommation »

Jonathan Lefrançois a commencé sa collection il y a deux ans, grâce à trois plantes trouvées dans le nouvel appartement qu’il venait de louer. En publiant quelques photos de ses nouveaux « bébés » sur Instagram, le jeune trentenaire constate vite qu’il existe un intérêt pour les pousses vertes. D’un coup, ses abonnés augmentent et commentent ses photos.

Stimulé par cet engouement instantané, Jonathan se met à vouloir plus de plantes pour publier plus de contenu et compter plus d’abonnés.

Mais un jour, il réalise qu’il souffre d’un problème de consommation, qu’il est obsédé par l’envie d’avoir de nouvelles espèces à photographier.

« Ça n’a pas de sens d’acheter de nouvelles plantes pour faire de belles photos, puis de les mettre dans un coin et ne plus s’en occuper. Pendant un mois ou deux, je l’ai fait. J’ai fini par réaliser que les perdre, ce n’est pas écologique non plus. »

— Jonathan Lefrançois

Après mure réflexion, Jonathan décide qu’il partagera moins d’images sur les réseaux sociaux. Il décrète aussi qu’il ne dépensera plus un sou pour acheter une nouvelle plante. Pour grossir sa collection consciencieusement, il va continuer à compter sur les sites d’échanges et sur les boutures offertes par d’autres amoureux de végétaux. Parce que la communauté d’amateurs de plantes est incroyablement généreuse, dit-il.

Jonathan a acheté 35 % de ses plantes. Les autres, il les a obtenues grâce à des échanges avec d’autres internautes, comme cette fois où il a eu l’air louche dans un parc à troquer un sac brun avec une femme. Ce jour-là, il avait mis la main sur un collier de perles, une plante (pas un bijou !) particulièrement photogénique.

Quand il visite des commerces, il lui arrive aussi de demander des plantes. « À la buanderie, j’ai dit à la dame au comptoir que la misère était belle. Elle m’a coupé plein de bouts de tige. Au bar l’Isle de Garde, il y avait une super belle jardinière et j’ai demandé si je pouvais en prendre une partie. Je demande toujours la permission. Si tu demandes aux gens qui aiment les plantes, les chances sont que s’ils peuvent en couper, ils vont le faire. »

Un investissement en temps 

Jonathan n’a pas de routine établie pour ses plantes à part quand il en accueille une nouvelle à la maison. Il la retire de son pot, lave ses racines, inspecte ses feuilles et la rempote dans un pot propre. Il isole ensuite sa nouvelle recrue au minimum trois semaines pour prévenir une infestation de parasites.

Sinon, il enfonce régulièrement son doigt dans le terreau de ses plantes pour jauger l’humidité. Il arrose au besoin.

« Si je fais une “journée plantes”, mettons un samedi, ça me prend facilement quatre ou cinq heures. Je les apporte toutes dans le bain-douche et je les arrose en même temps. Puis, je les inspecte une par une. C’est le meilleur moyen de prévenir les infestations. »

— Jonathan Lefrançois

Pour gagner sa vie, Jonathan travaille à son compte comme designer graphique. Il a donc des aptitudes pour composer de belles images lumineuses qui attirent l’œil. Avec le temps, il a aussi apprivoisé les réseaux sociaux. Il sait qu’une image sur fond blanc génère davantage de mentions « j’aime ». Au contraire, une photo de bouffe ou d’un week-end au chalet lui fait perdre des abonnés. Le barbu tatoué sait aussi se mettre en scène. Souvent, il pose en débardeur avec un hoya ou une maranta.

Visiblement, le style de Jonathan Lefrançois plaît. Son compte Instagram est suivi par près de 20 000 internautes des États-Unis, de l’Australie, de l’Indonésie…

« Des fois, les gens m’écrivent, mais je n’ai aucune idée ce qu’ils essaient de me communiquer. Ils utilisent des caractères arabes ou une écriture japonaise. Je réponds par une émoticône de cœur même si je viens peut-être de me faire insulter. »

S’il se fait quotidiennement poser des questions sur des sujets comme des cochenilles ou des feuilles flétries, Jonathan déteste l’idée qu’on le considère comme un influenceur ou, pire, comme un expert. « Je n’en suis pas un », répète-t-il. Ce qui l’horripile aussi, c’est que des gens soient tentés de dépenser pour des plantes qu’ils ont vues sur son compte Instagram.

Le millénial le voit bien : il y a des modes qui font exploser le prix de certaines plantes. Il y a deux ans par exemple, il a payé 65 $ pour un beau monstera panaché en pleine santé. Aujourd’hui, une petite bouture peut atteindre 150 $.

« Je ne veux pas participer à l’hystérie. Je ne veux pas faire acheter des trucs aux gens. Le message que j’essaie de transmettre, c’est que c’est un passe-temps qui n’est pas obligé de coûter cher. Dans les groupes de plantes, c’est facile d’en échanger ou d’en acquérir sans dépenser un seul sou. »

Où échanger et acheter des plantes ?

Ses plantes, Jonathan les appelle parfois ses « bébés ». Il en a 150. Le « papa » trentenaire nous transmet ici ses sites d’échange et boutiques préférés qui lui ont permis de fonder sa grande famille.

— Émilie Bilodeau, La Presse

Sites d’échange

Houseplant Hobbyist Montreal

Jonathan Lefrançois est l’un des fondateurs de cette page Facebook consacrée à l’échange de plantes. Contrairement à plusieurs sites du genre, la vente de végétaux et d’accessoires y est permise pourvu qu’on n’y fasse pas de sollicitation.

Bunz Planting Zone Montreal

À la base, Bunz a été créée à Toronto pour échanger de vieux disques, de la sauce tomates et d’autres gugusses. Comme les plantes commençaient à prendre beaucoup de place, plusieurs sites parallèles sont nés, par ville. Voici ici la page Facebook consacrée à l’échange de plantes, à Montréal.

La Passion des Plantes au Québec

Oui, il s’agit d’un site d’échange, mais c’est surtout un endroit où s’informer quand une poudre blanche apparaît sur le yucca, quand les feuilles d’un ficus jaunissent ou quand on cherche l’identité d’une plante. Quelqu’un connaît sûrement la réponse, ici.

Boutiques

Abaca

Abaca, c’est un fleuriste qui vend aussi des plantes d’intérieur. « J’aime cette entreprise de quartier et leurs prix sont très justes », souligne Jonathan.

2565, rue Beaubien Est, Montréal

Evasia

Jonathan avoue qu’il n’a jamais mis les pieds dans cette boutique, mais les membres du groupe Facebook qu’il a fondé, Houseplant Hobbyist Montreal, font très souvent mention de cette adresse. « Ils en parlent tout le temps », insiste-t-il.

3956, rue Ontario Est, Montréal

Pépinière DS

Jonathan fréquente aussi les pépinières pour trouver des plantes à prix abordables. Parfois, il va chez Planterra, Cactus fleuri, Marsollais, et il aime particulièrement Pépinière DS, une entreprise familiale. « J’adore aller là ! Les prix sont super et ils ont souvent des plantes pas trouvables ! »

1050, Route 125, Sainte-Julienne

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