ACCOUCHEMENTS PRÉMATURÉS

Les risques évalués par l’analyse du sang maternel

Depuis une demi-douzaine d’années, de plus en plus de tests du sang maternel permettent d’en apprendre plus sur le bébé. La détection de la trisomie 21, autrefois associée à un risque de fausse couche, a été la première à bénéficier de cette avancée. Des chercheurs américains viennent d’ajouter l’évaluation sans échographie de la date d’accouchement. La technologie pourrait aussi prédire le risque de travail prématuré et la pré-éclampsie.

LE CONTEXTE

Des molécules du sang du fœtus sont présentes en infime proportion dans le sang maternel durant la grossesse. Les progrès des analyses génétiques permettent maintenant de tirer des conclusions sur la santé du bébé à partir de ces fragments. Stephen Quake, physicien de l’Université Stanford, est l’un des chercheurs qui ont fait avancer la recherche clinique en génétique prénatale. « Je m’intéresse à l’interface entre la biologie et la technologie, explique M. Quake, qui est l’auteur principal d’une étude sur le sujet parue dans Science au début de juin, en entrevue d’Athènes, en Grèce, pour une conférence de biophysique. J’ai commencé à travailler sur l’amélioration des technologies de séquençage génétique à partir de mon propre génome. Ensuite, je me suis penché sur les analyses prénatales non invasives. »

LA GENÈSE

« Nous avons été les premiers à montrer, en 2008, que le risque de trisomie 21 peut être évalué à partir du sang maternel, dit M. Quake. Ensuite nous nous sommes attaqués à d’autres problèmes plus fréquents dans les grossesses. Nous travaillons sur la prématurité depuis une demi-douzaine d’années. » Selon lui, le nombre d’amniocentèses, une analyse du liquide amniotique qui comporte un risque faible de fausse couche (0,6 % selon la célèbre clinique Mayo du Minnesota), a diminué de 70 % depuis que les tests sanguins permettent de mieux prédire le risque de trisomie 21.

CE QUE RÉVÈLE L’ÉTUDE

L’étude de Science, qui portait sur 70 femmes enceintes, montre que l’estimation de la date d’accouchement par l’analyse du sang maternel est aussi bonne qu’une échographie de premier trimestre, et que la prédiction du risque d’accouchement prématuré est assez bonne pour être utilisée en clinique. « La prédiction de la date d’accouchement n’est pas le résultat le plus important, dit le physicien californien. Le potentiel clinique du test de prématurité est beaucoup plus important. On pourra suivre de plus près les femmes à risque, prendre des mesures préventives, et leur donner accès plus rapidement à la salle d’accouchement s’il n’a pas été possible de contrer les facteurs de prématurité. Mais le test de date d’accouchement pourra aussi être utile pour les femmes qui ne se rendent pas compte qu’elles sont enceintes, parce que l’échographie est moins précise aux deuxième et troisième trimestres. De plus, on pourra éviter de faire une échographie seulement pour savoir la date d’accouchement, parce qu’un test sanguin coûte moins cher. Ça pourrait être utile dans les pays en voie de développement. »

ET MAINTENANT ?

M. Quake estime qu’il faudra au minimum trois ans pour que le test de prématurité soit validé par les autorités sanitaires américaines, la Food and Drug Administration. Ensuite, il veut s’attaquer à l’évaluation du risque de pré-éclampsie, un mauvais fonctionnement du placenta pour lequel il existe déjà des tests sanguins et d’urine. « Nous pourrons aussi utiliser les molécules que nous avons associées au risque de prématurité dans les recherches sur les médicaments pour la prévenir. Nous ne comprenons pas pour le moment en quoi ces molécules sont associées à la prématurité. »

QUELQUES CHIFFRES

7,3 % proportion de filles nées prématurément

8,3 % proportion de garçons nés prématurément

55,6 % proportion de prématurité dans les grossesses multiples (jumeaux, triplés, etc.)

9,4 % proportion de prématurité quand la mère a plus de 35 ans

Source : Statistique Canada

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