Opinion

Le Canada est-il à la veille d’une vague conservatrice ?

Alors que les libéraux de Justin Trudeau dominent le paysage politique fédéral, les partis conservateurs provinciaux ont le vent en poupe. Sommes-nous à la veille d’une vague conservatrice ? Et quelles seront les conséquences ?

Qu’est-ce que le Parti progressiste-conservateur de l’Ontario, la Coalition avenir Québec et le United Conservative Party de l’Alberta ont en commun ? Étant donné la diversité des intérêts régionaux, il est difficile de donner une définition commune du genre de conservatisme que ces partis politiques incarnent.

Ils ont néanmoins trois caractéristiques communes : d’abord, ils s’engagent à baisser les impôts et à réduire la taille de l’État ; ensuite, ils ont une posture anti-establishment ; enfin, ils font face à des gouvernements impopulaires. Servons-nous de ces caractéristiques pour vérifier l’hypothèse d’une vague conservatrice.

Ontario

Commençons par l’Ontario. L’OntarioPC, dirigé par le sulfureux Doug Ford, semble prêt à sortir de la malédiction électorale qui l’avait gardé dans l’opposition pendant 15 ans.

Sur le plan économique, il n’y a pas de grande surprise : M. Ford s’engage à baisser les impôts de la classe moyenne et des petites entreprises, à investir dans certains grands chantiers, tout en réduisant les dépenses de l’État.

Il est aidé en cela par un discours anti-élitiste dont la cible est le gouvernement libéral de Kathleen Wynne, très impopulaire.

M. Ford s’est d’ailleurs engagé à mettre sur pied une commission d’enquête sur le dernier budget de Mme Wynne.

L’anti-establishment de M. Ford se manifeste aussi par sa promesse de sortir l’Ontario du marché du carbone qui, selon lui, ne sert qu’à donner des millions de dollars à la Californie et au Québec. Un affrontement avec le gouvernement fédéral s’annonce à l’horizon.

Québec

Passons au Québec. Quoiqu’il ne soit pas exclu que le gouvernement libéral remporte les prochaines élections, la Coalition avenir Québec (CAQ) de François Legault est perçue comme le parti de l’alternance.

On peut penser que M. Legault s’engagera à baisser les impôts de la classe moyenne et des entreprises, et à réduire les dépenses de l’État.

Il sera sans doute tenté d’intervenir directement dans certains secteurs de l’économie.

Il a déjà annoncé qu’il renégociera le contrat donné par la Caisse de dépôt et placement du Québec à Alstom pour la construction du Réseau express métropolitain (REM), afin qu’une partie du contrat soit exécutée au Québec.

Alberta

Terminons par l’Alberta. Après avoir élu pour la première de leur histoire un gouvernement néo-démocrate, les Albertains semblent prêts à réélire les conservateurs.

Puisque les prochaines élections auront lieu en 2019, il est difficile de prédire leur programme économique. Ce qui ne fait aucun doute, c’est que les néo-démocrates sont perçus comme ayant été incapables de remédier au ralentissement économique de la province.

Les conservateurs ont réussi leur reconstruction et ont élu un chef, Jason Kenney, que plusieurs perçoivent comme étant le mieux à même de redresser l’économie et d’affronter le gouvernement fédéral et les opposants à l’industrie pétrolière.

M. Kenney a annoncé qu’il fera la guerre à la « gauche écolo » et sortira du marché du carbone. Il n’hésitera pas non plus à s’opposer au Québec, comme il l’a fait dans le passé.

Quelles seront les conséquences politiques ?

Cela créerait une nouvelle dynamique pour les libéraux fédéraux : on pourrait assister à rééquilibrage des forces politiques et idéologiques. On pourrait également assister à un affrontement incessant entre les provinces et le gouvernement fédéral. Trudeau pourrait même faire campagne contre Doug Ford pendant les prochaines élections fédérales. Enfin, on pourrait assister à une dérive populiste qui conjuguerait le repli identitaire et l’hostilité envers le Québec.

Le premier test sera les élections ontariennes le 8 juin prochain.

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