OPINION CLAUDE CASTONGUAY

ÉLECTIONS PROVINCIALES
Veut-on revoir Gaétan Barrette ministre de la Santé ?

La question de la santé va constituer un facteur déterminant dans le choix que les électeurs seront appelés à faire en octobre

Alors que le scrutin d’octobre approche, il m’a semblé approprié de faire le point sur notre système de santé et sur le passage du Dr Gaétan Barrette à la tête du ministère de la Santé et des Services sociaux. D’autant plus que, malgré l’importance de la question, personne ne l’a jusqu’ici abordée de façon crédible avec un ensemble de propositions sérieuses.

Dès sa nomination, Gaétan Barrette a choisi d’adopter la méthode forte. Ainsi, face à l’opposition généralisée contre son premier projet de loi visant à lui conférer tous les pouvoirs sur notre système de santé, il a imposé son adoption par l’Assemblée nationale au moyen du bâillon. À ma connaissance, jamais cette mesure d’exception pour des situations d’urgence n’a été utilisée pour un projet de loi de cette importance. Une question qui touche l’ensemble des Québécois et accapare la moitié du budget du gouvernement.

Grâce à ses nouveaux pouvoirs dictatoriaux, Gaétan Barrette s’est empressé de dépouiller tous les établissements de leur autonomie et d’éliminer les associations représentatives en santé, en commençant par l’AQESSS, l’importante association des hôpitaux. Du coup, il a fait taire toutes les voix possiblement discordantes, ce qui a eu pour effet de créer un climat délétère dans les hôpitaux et les CHSLD.

Il a de plus fait, au nom de l’austérité, des coupes brutales dans les services dont les effets se font encore sentir. Ces gestes ont eu pour effet de démotiver tous les travailleurs qui, à un titre ou un autre, travaillent en santé.

Ceux qui ont eu à discuter ou à négocier avec lui se plaignent d’avoir été traités avec mépris et, parfois, d’avoir été menacés de représailles par le ministre. Au moment d’écrire ces lignes, dernier épisode, les dentistes demandent que Gaétan Barrette soit retiré du dossier des négociations avec le gouvernement. Après quatre ans de ce régime, nombreux sont ceux et celles qui n’en peuvent plus.

LE GÂCHIS DE LA rémunération des médecinS

Sur le plan de la rémunération des médecins, le passage de Gaétan Barrette à la santé s’est avéré un immense gâchis. Ainsi, pendant qu’au nom de l’austérité de dures coupes de services ont touché les enfants et les plus vulnérables de la société, Gaétan Barrette a poursuivi l’objectif de la parité avec l’Ontario en vertu d’une entente qu’il avait conclue avec Philippe Couillard alors que ce dernier était ministre de la Santé. Il s’agissait d’un non-sens évident, compte tenu de l’écart entre notre richesse collective et celle de l’Ontario.

Nous apprenions récemment que même si les revenus des médecins québécois ont atteint et dépassé ceux de leurs voisins ontariens, ils vont bénéficier au cours des prochaines années d’augmentations additionnelles pouvant atteindre quelque 2 milliards. Tout cela alors que les infirmières dénonçaient leurs conditions de travail et criaient au secours et que les conditions de vie dans nombre de CHSLD faisaient l’objet de révoltantes révélations.

Force est de conclure que, malgré certains progrès ponctuels limités, les problèmes d’accès et d’inadaptation aux soins, les longues attentes dans les urgences, les nombreux reports d’interventions, les conditions déplorables de vie dans les CHSLD demeurent nettement inacceptables et que des changements en profondeur sont nécessaires. Une forte majorité de Québécois sont d’ailleurs d’avis que la santé est mal gérée.

Les organismes représentant un nombre impressionnant de médecins, les gestionnaires des établissements, les personnels professionnels et techniques et les préposés aux malades ont récemment clairement décidé d’ignorer les menaces de représailles et dénoncent ouvertement Gaétan Barrette.

Il ne fait aucun doute que son passage à la santé se solde par un énorme échec dont nous allons subir longtemps les conséquences. C’est le bilan que les libéraux présentent après 15 années quasi ininterrompues à la tête du gouvernement.

Un bilan qui a forcé le premier ministre à retirer des mains de son ministre l’application des lois 20 et 30 et de confier au président du Conseil du trésor les récentes négociations avec les médecins. Soit dit en passant, des négociations qui n’ont même pas abordé le mode de rémunération des médecins et qui n’ont rien réglé quant aux augmentations à venir. Plus récemment, sous la pression du milieu et en vue des élections, Philippe Couillard a annulé deux décisions de son ministre : il a rétabli la fonction de Commissaire à la santé et annulé la fusion de l’hôpital Sainte-Justine avec le CHUM.

Est-ce que les Québécois veulent, face à ce bilan et à ce désaveu, revoir Gaétan Barrette comme ministre de la Santé dans le gouvernement issu du scrutin d’octobre ? Voilà la question qui se pose.

Or, si les libéraux sont réélus, il affirme que c’est ce qui arrivera, à moins que Philippe Couillard ne s’engage avant octobre à ne pas le renommer à cette fonction.

La question de la santé va assurément constituer un facteur déterminant dans le choix que les électeurs seront appelés à faire en octobre. Ce qui nous conduit à la question suivante : comment redynamiser notre système de santé et faire en sorte que les Québécois sans égard à leur âge reçoivent les soins et services de qualité auxquels ils ont droit et pour lesquels ils paient le gros prix ?

C’est mon intention d’aborder dans un prochain texte l’énorme tâche à laquelle vont se confronter le prochain gouvernement et son ministre de la Santé. Dans l’hypothèse d’un ministre de la Santé autre que Gaétan Barrette.

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