Prix Louis-Comtois et Pierre-Ayot

Cynthia Girard-Renard et Adam Basanta honorés

Les artistes visuels montréalais Cynthia Girard-Renard et Adam Basanta ont remporté respectivement, hier, les prix Louis-Comtois et Pierre-Ayot remis par l’Association des galeries d’art contemporain (AGAC) et la Ville de Montréal. 

Cynthia Girard-Renard 

Elle aura 50 ans l’an prochain et a su conserver son cœur d’enfant. Depuis une vingtaine d’années, Cynthia Girard-Renard enrichit l’univers pictural québécois avec ses œuvres faussement naïves où toutes sortes d’animaux sont mis en scène pour critiquer les comportements humains. Les animaux lui sont si familiers et inspirants qu’elle a ajouté Renard à son nom de famille. Pour marquer son identité propre en tant qu’artiste et comme personne.

Après le prix Takao-Tanabe, remis par le Musée des beaux-arts du Canada plus tôt cette année, elle remporte ainsi le 23prix Louis-Comtois destiné aux artistes contemporains à mi-carrière. Elle succède à Sophie Jodoin, Aude Moreau, Nicolas Baier et Patrick Bernatchez, les quatre derniers lauréats.

Cynthia Girard-Renard était en compétition avec Yann Pocreau et Chih-Chien Wang. Sa récompense comprend une bourse de 7500 $ et un budget de 2500 $ pour lui permettre d’organiser une exposition solo à Montréal. La Ville fera aussi l’acquisition d’une de ses œuvres pour sa collection d’œuvres d’art.

Professeure à l’Université Concordia depuis deux ans, c’est à ses étudiants que Cynthia Girard-Renard pense quand on lui demande si cet honneur lui fait plaisir. « C’est motivant pour eux », dit la diplômée du Goldsmiths College de Londres et de l’UQAM.

Peintre et poétesse, Cynthia Girard-Renard est un des artistes québécoise les plus innovants de sa génération. Son art narratif est imprégné de culture populaire et de cet univers du conte fantastique qui le rend très accessible. Elle a une véritable passion pour la littérature et pour l’écriture depuis sa plus tendre enfance. 

Son premier livre, un recueil de poésie intitulé Une mort désamorcée, est sorti en 1995. C’est souvent dans les livres que Cynthia Girard-Renard puise son inspiration pour réaliser ses toiles aux couleurs vives qui parlent de pollution, de diversité biologique, de violence, d’inconscience humaine, d’identité, de guerre, de résilience ou encore de sexualité.

Cette artiste singulière a déjà dans sa musette des expositions individuelles marquantes, comme Nos maîtres les fous au Musée d’art de Joliette l’an dernier, Unicorns and Dictators à l’Esker Foundation de Calgary en 2014, Tous les oiseaux sont ici au Kunstlerhaus Bethanien de Berlin en 2009, ou encore Fictions sylvestres au Musée d’art contemporain de Montréal en 2005. 

Collectionnée par de prestigieuses institutions et de grands collectionneurs, elle a aussi participé à de nombreuses expos collectives telles que la Biennale canadienne 2017, au Musée des beaux-arts du Canada, Patriot Loves : Visions of Canada in the Feminine, à la Carleton University Gallery en 2011, et la Triennale québécoise, au Musée d’art contemporain de Montréal en 2008.

« Je suis actuellement sur un projet qui me dépasse complètement, soit la création d’un corpus de peintures géantes mettant en vedette les chauves-souris ! dit-elle. Je m’intéresse à elles pour différentes raisons. Leur caractère naturel « queer » en tant qu’à la fois oiseau et mammifère, leur état fragile à cause du syndrome du museau blanc, mais aussi leur beauté surprenante et leur lien avec le monde imaginaire des vampires ! » 

Adam Basanta

Né en Israël et ayant vécu sa jeunesse à Vancouver, Adam Basanta est à Montréal depuis huit ans. Compositeur de musique expérimentale et artiste multimédia spécialisé dans les installations sonores et numériques, les performances actives et les sculptures cinétiques, il est honoré d’être reconnu « et adopté » en tant qu’artiste montréalais.

« Cette dernière année, je me suis surtout produit à l’extérieur du Canada, alors ça fait toujours plaisir d’être reconnu par l’endroit où je vis et travaille, dit-il. Montréal est unique. C’est un endroit très importante pour moi. Et des institutions d’ici ont joué un rôle important au début de ma carrière, notamment la galerie B312 et Eastern Bloc. » 

Fasciné par la technologie, Adam Basanta innove en permanence. L’été dernier, lors de la Biennale internationale d’art numérique de Montréal, il a présenté à l’Arsenal son œuvre All We’d Ever Need Is One Another, une usine de fabrication d’œuvres d’art opérant grâce à la numérisation autogénérée.

L’installation produisait chaque jour 1200 images envoyées à un ordinateur qui les comparait à une banque de données de 1,5 million d’images provenant de collections muséales. Quand l’image ressemblait à 80 % à l’une de ces œuvres d’art, elle en devenait une variation. Adam Basanta a ainsi créé une œuvre ressemblant à 81 % au tableau Red, White and Brown peint en 1957 par Mark Rothko et une autre à 68 % proche de la peinture Shade III de Pierre Dorion. 

« C’est une réflexion sur ce que signifie le fait qu’une machine peut créer de l’art, dit-il. Et ça change notre façon de considérer la machine et la technologie. »

Ces dernières années, Adam Basanta a présenté ses œuvres technologiques et joué de la musique électronique principalement en Europe, où il commence à avoir une belle réputation. En octobre, il a fait une tournée de deux semaines en France avec le saxophoniste Jason Sharp, Adam Basanta retravaillant les sons en direct, tel un designer sonore. Il continue de composer de la musique, notamment de la musique de chambre jouée par le Quatuor Bozzini.

Il a exposé depuis trois ans dans des galeries et des institutions de renom telles que le Fotomuseum Winterthur, en Suisse, le Centre national d’art de Tokyo, le musée Serralves, au Portugal, l’Edith-Russ-Haus für Medienkunst, en Allemagne, la York Art Gallery, en Angleterre, et le Center for Contemporary Arts de Santa Fe, aux États-Unis.

Représenté à Montréal par la galerie Ellephant, Adam Basanta a remporté le Japan Media Arts Prize en 2016 et l’Aesthetica Art Prize du magazine britannique Aesthetica, l’an dernier. 

Le prix Pierre-Ayot est traditionnellement remis à un artiste ayant moins de 10 ans de pratique. Cette année, Adam Basanta était en concurrence avec Jinyoung Kim et Léna Mill-Reuillard. Il reçoit une bourse de 5000 $ et un budget de 2500 $ pour organiser une expo individuelle dans la métropole et une de ses œuvres intégrera bientôt la collection de la Ville de Montréal.

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