Changements climatiques

Le casse-tête des patinoires extérieures

Il fut un temps, jadis, où l’on pouvait patiner dehors à Montréal et un peu partout au Québec de novembre à mars, ou à peu près, sans craindre de se retrouver les patins dans l’eau. Mais dans la plupart des grands centres, ce temps est, bien sûr, révolu. Heureusement, il y a des solutions. Et peut-être un peu d’espoir.

Une activité menacée ?

Les images dignes d’une carte postale avec des enfants qui jouent au hockey à la patinoire du coin sous une fine neige qui tombe du ciel sont-elles appelées à disparaître ? « J’ai publié une étude en 2012 qui démontrait que les projections des températures, basées sur des prévisions de changements climatiques, allaient modifier la saison du hockey extérieur, explique le professeur Lawrence Mysak, du département des sciences atmosphériques et océaniques de l’Université McGill. Si les émissions de CO2 ne vont pas à la baisse, dans 25 ans, au Canada, il n’y aura plus vraiment de saison pour les sports d’hiver, comme le ski de fond ou le hockey extérieur. Le Québec sera frappé aussi. Il fera encore froid au Québec l’hiver, mais il y aura aussi des pluies plus abondantes et des périodes de réchauffement rapide. »

Les patinoires du CH, une solution

Mais tout n’est pas si noir. Depuis 2008, le projet des patinoires Bleu blanc rouge, lancé par la Fondation des Canadiens pour l’enfance, a permis l’inauguration de 10 patinoires extérieures, dont 6 dans la région montréalaise. Le but était de placer ces glaces dans des milieux défavorisés afin de permettre une pratique du hockey pour tous, mais derrière cette bonne intention se cache une excellente idée : la prolifération des patinoires extérieures munies d’un système de réfrigération, qui permet de prolonger la saison du hockey dehors. Ainsi, il est généralement possible de prolonger la saison de hockey extérieur d’environ six semaines, de la fin novembre à la mi-mars. Mais il y a un prix à ça, la création d’une telle patinoire coûte environ 1,4 million de dollars, avec des frais d’exploitation qui peuvent être de quelque 200 000 $ par année.

Les défis

Les patinoires extérieures ne sont pas infaillibles, et les gens de la Ligue nationale de hockey, qui présentent des matchs extérieurs de façon régulière depuis 15 ans, en savent quelque chose. « On a présenté un match à l’extérieur à Los Angeles, alors je pense que notre équipe est capable de composer avec la chaleur ! estime Omar Mitchell, vice-président de la responsabilité corporative et sociale de la LNH. Mais nous suivons de près ce que le projet Rink Watch nous offre au chapitre des données, et je crois que nous pourrons continuer à présenter des matchs extérieurs, même s’il fait de plus en plus chaud. Avec une glace extérieure, notre plus gros défi n’est pas la chaleur en tant que telle, mais bien les reflets du soleil qui plombent directement sur la glace. Les joueurs nous disent que la glace devient molle très rapidement si le soleil plombe à un endroit précis pendant de trop longues minutes. »

Rink Watch, c’est quoi, au juste ?

Lancé en 2013 par des chercheurs de l’Université Wilfrid-Laurier en Ontario, le projet Rink Watch observe de près le « comportement » de quelque 1400 patinoires extérieures partout en Amérique du Nord. Selon Rink Watch, depuis 1950, les températures hivernales au Canada ont augmenté de plus de 2,5 °C en moyenne, ce qui a pour effet de fortement compromettre les futures saisons de hockey extérieur. « La possibilité de patiner et de jouer au hockey extérieur est un aspect critique de la culture et de l’identité canadiennes, peut-on lire sur le site de Rink Watch. Wayne Gretzky a appris à patiner sur une patinoire dans la cour de la maison. Nos résultats permettent de croire que de telles occasions ne pourraient pas être envisageables pour les enfants canadiens des générations futures. »

Il fait chaud à Montréal, il fait chaud à Toronto

En 2016, la Ville de Montréal a annoncé un investissement de 7,3 millions au cours des trois années suivantes afin de construire des patinoires réfrigérées ou de recouvrir certaines surfaces. Une autre bonne idée, puisque s’il faut se fier aux données d’Environnement Canada, les températures moyennes à Montréal sont à la hausse ; par exemple, de 1981 à 2010, il a fait en moyenne - 7,7 ˚C à Montréal au mois de février, alors que cette moyenne était de -8,8 ˚C lors du même mois de 1961 à 1990. C’est encore plus chaud à Toronto, là où les patinoires extérieures arrosées à la main ne sont plus qu’un vague souvenir.

Une citation

« Enfant, j’allais jouer au hockey dehors chaque fois que j’avais du temps libre. Il n’y avait rien qui pouvait battre ça ; mes amis et moi, on formait des équipes, huit ou neuf gars, on y allait le matin, l’après-midi, et des fois, on ne revenait que le soir. »

— Jonathan Marchessault, des Golden Knights de Las Vegas

Source : nhl.com

Évolution des températures moyennes à Montréal

Années Déc Jan Fév Mars

1961-1990 -6,9 °C -10,3 °C -8,8 °C -2,4 °C

1971-2000 -6,3 °C -10,2 °C -8,4 °C -2,3 °C

1981-2010 -5,4 °C -9,7 °C -7,7 °C -2 °C

Source : Environnement Canada

Températures moyennes à Montréal et à Toronto

Décembre -5,4 °C -0,5 °C

Janvier -9,7 °C -3,7 °C

Février - 7,7°C -2,6 °C

Mars -2°C -1,4 °C

Source : Environnement Canada

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