École nationale de l’humour

Une semaine à l’école des humoristes

Pour ses 30 ans, l’École nationale de l’humour (ENH) a connu un nombre record d’inscriptions : 170 candidats se sont présentés aux auditions pour intégrer le programme de création humoristique. Alors que les soirées d’humour se multiplient, que viennent chercher les élèves à l’ENH ? La Presse a passé une semaine à leurs côtés pour mieux comprendre la formation offerte aux humoristes et auteurs de demain.

17 avril, 10 h.

Humour et société (humoristes 1re année et auteurs)

Enseignants 

Luc Boily et Christian Vanasse

Auteurs et humoristes se succèdent pour lire chacun leur tour leur billet d’humeur du jour ainsi que leurs exercices d’écriture. Immigration, guerre en Syrie, féminisme : tous les thèmes abordés doivent concerner l’actualité. Ils recevront ensuite les commentaires de leurs enseignants, mais aussi de leurs pairs. Le cours vise à permettre aux élèves de maîtriser l’actualité pour pouvoir l’utiliser à travers divers formats, du liner au mème, en passant par la capsule web ou la brève humoristique qui pourrait figurer dans un bulletin d’information à la Saturday Night Live.

« L’idée est d’apprendre à identifier les nouvelles et de voir comment les traiter. Ils tentent de trouver un sens à cette actualité dramatique », précise Luc Boily, l’un des deux enseignants.

Depuis près de 20 ans à l’ENH, son collègue Christian Vanasse considère que l’humour social est plus présent que jamais au Québec. « Quand j’ai commencé à enseigner, on était encore dans les relents de la grosse vague absurde des années 80-90. Il n’y avait pas vraiment de conscience sociale. L’humour politique n’était pas ce qui marchait le plus, disons ! Les étudiants sont plus branchés et informés que par le passé », explique l’enseignant qui aborde également des notions plus théoriques sur la démocratie et les systèmes politiques.

17 avril, 14 h.

Écriture d’un scénario de comédie pour la télé (auteurs)

Enseignant 

Daniel Chiasson

Les élèves créent un épisode de sitcom qu’ils vont devoir présenter à des producteurs à la fin du cours. Chaque élève doit élaborer un concept de A à Z (dialogues, scène à scène, etc.), mais aussi un document de présentation écrit qui sera remis à des producteurs télé. « Tout est fait pour que ça ressemble aux conditions réelles sur le marché du travail. On leur demande de faire le processus complet d’écriture d’un 22 minutes. Je suis un peu le script-éditeur de sept étudiants ! », explique l’enseignant Daniel Chiasson.

Diplômé de l’ENH en 1996, l’auteur et scénariste s’est basé sur son vécu professionnel pour monter le cours, qu’il donne pour la première année. « C’est l’enseignement à son meilleur : zéro discipline et sept personnes qui t’écoutent et veulent apprendre », confie-t-il.

18 avril, 9 h 30.

Techniques vocales (Humoristes 1re annéE)

Enseignante 

Hélène Parent

Pendant près de quatre heures chaque semaine, la coach vocale Hélène Parent donne les outils théoriques et pratiques nécessaires à ses élèves pour mieux contrôler leur appareil vocal. Souffle et tonicité des muscles qui le soutiennent, enracinement du corps, posture de la colonne vertébrale, détente du haut du corps et assouplissement de l’appareil phonateur sont les bases de la technique utilisée par l’enseignante.

Assis sur des ballons, les quatre aspirants humoristes commencent le cours en faisant des étirements. Ils utilisent ensuite des extraits de leur numéro présenté lors du spectacle de fin d’année au Club Soda pour explorer le spectre des intonations et émotions qu’ils peuvent utiliser sur scène.

18 avril, 11 h.

Auditions pour l’admission à l’ENH

Les trois juges – Luc Boily, Stéphane Mayer et Christiane Vien – voient défiler chaque jour une vingtaine de candidats venus auditionner en vue de faire partie des futurs élèves de l’ENH. Au total, 170 personnes vont se présenter devant le jury cette année – un record. « Il y a plus de soirées d’humour pour tester leur matériel avant les auditions, donc plus de candidatures intéressantes. Ils doivent présenter un numéro de 5 minutes et on consacre 20 minutes à chaque candidature », explique Stéphane Mayer. Une première sélection sera faite pour le stage et seuls une douzaine d’élèves seront finalement retenus. 

Pour les auteurs, le processus de sélection est différent : les candidats doivent envoyer un monologue et un sketch pour ensuite passer une entrevue devant deux juges. Une vingtaine de personnes feront le stage et huit d’entre elles intégreront l’ENH.

18 avril, 15 h.

Entrée en salle (humoristes 1re annéE)

Enseignant 

Luc Senay

En vue de leur spectacle au Club Soda (qui a eu lieu le 28 avril dernier), les élèves répètent sur la scène de la maison de la culture Mercier, où ils se produiront le soir même. Un évènement qu’ils préparent depuis janvier avec leur professeur, le comédien Luc Senay. « Notre souci est de faire en sorte que ça passe autant à la maison de la culture Mercier qu’au Club Soda devant leurs amis et la famille », lance-t-il d’emblée. « Mon travail est de les rendre aussi efficaces que possible », ajoute Luc Senay.

Les élèves ont tout d’abord préparé six numéros destinés à être joués sur scène. Ils ont ensuite dû faire le choix de celui qu’ils souhaitaient présenter au public. « Je fais mon choix, mais ils sont libres de sélectionner le numéro qu’ils veulent. Leur choix prime, mais habituellement, c’est pas mal la même chose ! », précise celui qui enseigne à l’ENH depuis les années 90. 

« Ma job est de trouver l’angle sous lequel ils veulent traiter leur sujet en essayant d’être le plus sensible possible à leur univers, que ce soit absurde, stand-up ou anecdotique. J’ai un rôle d’accompagnement », conclut-il.

19 avril, 9 h 30.

Chroniques (humoristes 2e année)

Enseignant 

Alex Perron

Pour ce dernier cours de la session, les élèves sont invités à lire la dernière version de la chronique qu’ils présenteront sur les ondes de la radio communautaire de Longueuil. Aux côtés d’Alex Perron, ils simulent leurs interventions comme s’ils étaient en studio.

Diplômé de l’ENH en 1996, Alex Perron enseigne également cette matière à l’Union des artistes. « Je veux habiliter mes étudiants à se débrouiller dans le monde de la chronique, que ce soit à la radio ou à la télé. On demande beaucoup aux humoristes de donner leur opinion. Il y a quelques années, on ne voyait pas ça du tout ! C’est une belle alternative à la scène, qui va les aider à se faire connaître et à payer des factures pendant qu’ils écrivent leur spectacle ! », explique-t-il. 

Depuis trois ans, l’enseignant simule également des entrevues avec les finissants pour les préparer à leurs premières participations à des talk-shows. « Ils m’envoient une page d’info et ils répondent à mes questions pendant 10 minutes. Cette simulation se fait devant une caméra et sera diffusée au Canal Savoir », précise Alex Perron.

19 avril, 13 h 30.

Gestion de carrière (Humoristes 2e année et auteurs)

Enseignant 

Martin Langlois

Agent de François Morency, Martin Langlois prépare ses élèves à entrer sur le marché du travail. Dès le début du cours, il passe en revue l’actualité de la semaine au sein de l’industrie. Tout au long de la session, une vingtaine de professionnels du milieu (créateurs, agents, producteurs, diffuseurs, etc.) interviennent dans son cours. Le jour de notre passage en classe, Johanne Pouliot, directrice de l’Association des professionnels de l’industrie de l’humour et productrice exécutive du gala Les Olivier, est venue parler de son organisme.

Martin Langlois organise également des visites au sein même d’entreprises comme KOTV, Phaneuf, Juste pour rire ou Zone 3, créant des ponts entre les employeurs potentiels et les finissants de l’ENH. L’enseignant crée actuellement une application mobile qui permettra à ses élèves de concevoir un plan de carrière personnalisé en répondant à un simple questionnaire.

20 avril, 13 h 30.

Écriture pour la scène II (auteurs)

Enseignant 

Daniel Langlois

Les auteurs sont réunis pour la première lecture des textes qu’ils ont écrits en vue du spectacle des auteurs qui sera présenté dans le cadre de Zoofest cet été. Il s’agit de la dernière étape avant que les comédiens Debbie Lynch-White, Joëlle Paré-Beaulieu, Sébastien René et Gabriel Dagenais ne les découvrent la semaine suivante. « Je voulais leur faire vivre ça, que des comédiens professionnels disent leurs textes ! », s’exclame Daniel Langlois, diplômé de l’ENH en 2005 et qui y enseigne pour la première fois.

« Je les accompagne jusqu’au spectacle. L’idée est de les amener le plus près possible d’une expérience professionnelle où ils sont un groupe d’auteurs et je suis leur script-éditeur. J’explique beaucoup plus qu’avec une équipe de professionnels, bien entendu. Ils ont écrit des sketchs et, au fur et à mesure, on en a éliminé », précise celui qui est également le metteur en scène du spectacle.

10 000 $

Coût de la formation en écriture humoristique, d’une durée d’un an et demi, incluant un stage en entreprise

15 000 $

Coût de la formation en création humoristique, d’une durée de deux ans, incluant une tournée de spectacles

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