Chronique

Chères familles, un peu de patience

Les familles qui ont voté pour la Coalition avenir Québec (CAQ) ont certainement très hâte d’obtenir les baisses d’impôt promises lors de la dernière campagne électorale.

Mais elles devront être patientes. Même si Québec nage dans les surplus – près de 4 milliards au 30 septembre dernier, n’est-ce pas fantastique ? –, le nouveau ministre des Finances, Éric Girard, est resté prudent dans son premier énoncé économique, dévoilé hier.

Dans cet exercice aux allures d’un mini-budget, il a offert des allégements de 358 millions aux particuliers pour la prochaine année (2019-2020), un peu moins que ce que les entreprises ont obtenu (448 millions).

Mais les mesures destinées aux contribuables, comme la bonification de l’Allocation famille et le gel de la contribution excédentaire pour les garderies, sont beaucoup plus timides que ce que la CAQ avait promis avant les élections. Quant à l’uniformisation et la réduction de la taxe scolaire, il n’y a pas eu un mot là-dessus hier.

Mais ce n’est qu’un début…

La CAQ s’était engagée à mettre en place ces réductions d’impôt sur quatre ans. Alors, on ne peut pas lui reprocher de ne pas livrer tous les cadeaux d’un coup sec, même si Noël est à nos portes.

Toutefois, il serait intéressant de savoir davantage à quoi s’attendre. « Ma mini-déception, c’est qu’on ne voit pas de plan », avoue Luc Godbout, professeur de fiscalité à l’Université de Sherbrooke.

Il espère que dans le prochain budget, au printemps, la CAQ fournira un échéancier pour l’implantation des baisses d’impôt promises, quitte à devancer les baisses si la situation économique le permet, comme on l’a vu avec la taxe santé dont la disparition annoncée a été devancée plusieurs fois.

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En attendant le prochain budget, les Québécois ont quand même de bonnes nouvelles à se mettre sous la dent.

Tout d’abord, quelque 425 000 familles auront droit à une bonification du programme de Soutien aux enfants, qui vient d’être rebaptisé Allocation famille.

Petit aparté : faut-il vraiment changer les noms des programmes chaque fois qu’un gouvernement y met son petit grain de sel ? Il est déjà si difficile pour les particuliers de s’y retrouver à travers les méandres du système fiscal, pas besoin de les mélanger encore plus pour des questions de marketing politique.

Cela dit, on peut se réjouir que Québec débloque 250 millions par an pour hausser sa « nouvelle » allocation.

En fait, les parents recevront jusqu’à 500 $ de plus par an pour leur deuxième et leur troisième enfant. Très bien ! Sauf que la CAQ parlait d’une somme de 1200 $ en campagne. On verra à quel rythme ces sommes seront bonifiées davantage au cours des prochaines années…

On est encore plus loin du compte avec la contribution excédentaire de 70 cents à 13,90 $ par jour que les parents mieux nantis doivent verser à la garderie.

La CAQ avait promis de l’abolir purement et simplement. Mais voilà que les troupes de François Legault annoncent un gel, en attendant la véritable élimination. Le fait de ne pas indexer la contribution à l’inflation est une mesure maigrichonne qui apportera à peine 1 million de dollars aux 140 000 familles qui paient la note. Ça fait 7 $ en moyenne par famille. Pas de quoi fouetter un chat !

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Par ailleurs, la CAQ a instauré un nouveau crédit pour les aînés de 70 ans et plus qui ont un budget limité. Une mesure-surprise qui ne figurait pas dans sa liste de promesses électorales.

Les aînés seuls qui gagnent moins de 22 500 $ auront droit à un maximum de 200 $ par année, tandis que les couples recevront jusqu’à 400 $ si leurs revenus familiaux sont inférieurs à 36 600 $.

La lutte contre la pauvreté chez les aînés est plutôt l’apanage du gouvernement fédéral, qui offre déjà la pension de la Sécurité de la vieillesse (PSV) et le Supplément de revenu garanti (SRG).

Mais Québec s’est assuré que son nouveau crédit s’arrime bien avec ces deux programmes fédéraux, puisque le montant ne fondra pas en même temps que la PSV et le SRG qui diminuent eux aussi au fur et à mesure que les revenus des aînés augmentent.

Reste que le nouveau crédit de Québec, qui rapportera un maximum de 17 $ par mois, est bien mince par rapport à l’ensemble des besoins des aînés. Mais la CAQ s’est engagée, hier, à faire un examen exhaustif des mesures fiscales à l’égard des aînés.

Un grand ménage serait le bienvenu ! En ce moment, il existe une telle panoplie de crédits destinés aux aînés : travailleurs d’expérience, aidants naturels, maintien à domicile, frais médicaux, et j’en passe. Chacun a ses propres critères, ses propres formulaires à remplir. Il y a fort à parier que de nombreux contribuables ne vont pas chercher l’aide à laquelle ils ont droit, parce que les programmes sont restrictifs, complexes et méconnus.

C’est bien beau offrir un coup de main aux aînés, mais encore faut-il s’assurer qu’ils puissent tous le saisir.

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