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L’aviculture urbaine clés en main

Des nouvelles méthodes dans les champs jusqu’aux produits nouveau genre, l’innovation est à l’honneur dans l’agroalimentaire. Tout l’été, notre chroniqueuse Marie-Claude Lortie vous présente des entreprises aux idées fraîches.

Pourquoi cette entreprise ?

Parce que c’est la première entreprise montréalaise à offrir une solution clés en main, conviviale, aux clients qui veulent avoir des poules pondeuses en ville, et parce que cette équipe possède aussi Alvéole, une jeune société déjà rentable offrant des produits et services d’apiculture urbaine. Bref, parce que c’est une autre étape de croissance de jeunes gens d’affaires qui veulent développer le marché de l’agriculture urbaine.

Les produits

Poc Poc vend d’abord et avant tout des poulaillers conçus par son propre designer industriel et adaptés à la réalité urbaine canadienne, ce qui inclut évidemment l’hiver ! Mesurant 3 pieds sur 7 pieds, donc pas tout à fait 1 mètre sur un peu plus de 2 mètres, les cages sont faites d’une combinaison de grillage très résistant aux ratons laveurs, écureuils et autres coyotes urbains et de panneaux légers et isolants qui, entre autres, protègent les poules contre le froid. Le poulailler s’achète en kit, pour 1200 $, et est livré par Canpar, en quatre boîtes, à la maison. On le monte facilement comme un meuble IKEA. Il y a des portes, une petite échelle, un petit espace de ponte, un système pour la nourriture et l’eau. Il est modulable pour convenir à différentes configurations dans le jardin. On pourra donc éventuellement l’agrandir. 

Poc Poc met aussi les clients en contact avec des fermiers de la région qui, pour 135 $, fourniront trois poules, de la nourriture pour un an, de la sphaigne et des copeaux de bois qui servent de litière et d’absorbant pour les excréments, ainsi que de la poussière d’écailles d’huître, dont les volailles ont besoin pour la coquille de leurs œufs. Ils fourniront aussi un peu de soutien pratique à l’élevage et répondront à certaines questions.

Poc Poc vend aussi des « kits d’hiver » avec lampe, fil chauffant et panneaux spéciaux pour isoler totalement le poulailler. 

La nouvelle mouture du poulailler – une version retravaillée d’un modèle vendu à plus petite échelle en 2017 – a été produite en 100 exemplaires, dont 30 sont déjà vendus et commencent à être distribués.

Les gens

Poc Poc est une nouvelle entreprise fondée l’an dernier par ceux qui sont derrière Alvéole, la société montréalaise qui démocratise l’apiculture urbaine depuis cinq ans et compte maintenant 35 employés. Il y a donc Étienne Lapierre, un saxophoniste qui a étudié à McGill avant de se lancer dans l’entrepreneuriat en agriculture urbaine, et Alexandre McLean, un autre musicien devenu entrepreneur, qui a passé les étés de son enfance à aider son oncle apiculteur. Les deux hommes de 27 ans sont des amis de longue date. Pour Poc Poc, ils se sont mis en équipe avec deux autres jeunes, Anaïs Radé, qui s’occupe du marketing et des communications et Étienne Guignard, le designer industriel qui a entièrement redessiné le poulailler Poc Poc en 2018.

Les défis

Contrairement aux ruches utilisées pour le projet Alvéole, les poulaillers de Poc Poc ont été entièrement conçus par l’entreprise, morceau par morceau. Les investissements ont donc été plus grands, puisque l’équipe devait gérer les fournisseurs. L’entreprise ne s’attend d’ailleurs pas à atteindre la rentabilité avant trois ans. 

Poc Poc a pu aller de l’avant grâce à une campagne de sociofinancement, mais aussi grâce à l’aide de la Banque de développement du Canada et de PME MTL. L’équipe ne craint pas la concurrence, car, explique Étienne Lapierre, même s’il existe d’autres poulaillers urbains à vendre sur le marché, ceux-ci sont souvent plus chers, pas livrés à domicile, sans lien avec un fermier et de l’aide, et pas adaptés à la réalité urbaine froide canadienne.

Le plus grand défi, disent les membres de l’équipe, c’est de passer par-dessus les idées préconçues pour convaincre les gens qu’avoir des poules urbaines, c’est facile, utile et agréable. Que c’est un projet rassembleur pour une communauté et non pas semeur de zizanie entre voisins. 

Chaque poule pond un œuf par jour, sauf en hiver où le rythme ralentit. L’hiver, les poules survivent aisément, comme à la ferme, avec peu de chauffage. « En fait, les grandes chaleurs comme cet été sont plus difficiles à gérer », explique Alexandre McLean. En outre, même s’il y a occasionnellement un voisin plus ou moins heureux de la présence de poules dans les environs, la vaste majorité du temps, c’est un élément fédérateur dans une ruelle ou un bout de rue, affirment Étienne et Alexandre. Les gens viennent voir ce que c’est. Les œufs sont distribués. Certains voisins se mettent ensemble pour acheter le poulailler et veiller sur les poules – les nourrir, nettoyer la cage – et partager les œufs. Les enfants s’occupent des poules. 

L’an dernier, Poc Poc a mis en marché une cinquantaine de poulaillers, un modèle bêta qui a été totalement transformé en 2018, avec les commentaires des utilisateurs. Autre défi : continuer de peaufiner le produit et garder son prix abordable. C’est pour cela que certaines pièces, explique Alexandre, sont fabriquées en Chine.

L’avenir

L’équipe de Poc Poc et d’Alvéole ne veut pas s’arrêter là. Son projet, ce n’est pas de vendre des poulaillers ou des ruches, mais bien des solutions clés en main pour toutes sortes de formes d’agriculture urbaine. « Nous, ce qu’on veut, c’est amener la nature en ville », dit Étienne Lapierre. L’avenir, c’est aussi de percer les marchés des autres villes canadiennes où les poules urbaines ont été légalisées, notamment Toronto et Ottawa. Actuellement, Montréal traîne la patte, même si les banlieues et quelques arrondissements permettent les poules. 

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