Stéphane Laporte Clin d'oeil Mardi 2018-05-01

Avant, on était déçu quand le Canadien ne terminait pas premier, maintenant, on est déçu quand le Canadien ne repêche pas premier.

OPINION

Pourquoi moi ?

Rares sont les boulots faits sur mesure et cela ne veut pas dire qu’on n’en a pas les capacités, bien au contraire !

Il y a quelques mois, un parti m’a approchée pour connaître mon intérêt pour une implication en politique active.

Cet appel m’a fait l’effet d’une bombe ! Prise dans les embouteillages de Montréal, j’ai raccroché et n’ai pu m’empêcher de pousser un : « Ah ben tabarnouche, pincez-moi, où sont les caméras cachées ? »

Je rêve de grands rôles à la télé et au cinéma, et on m’appelait pour me proposer celui de députée de circonscription dans la vraie vie ! Quelle surprise !

Mon père s’est toujours impliqué en politique pour les Français de l’étranger. Ma grand-mère a été l’une des premières femmes diplômées de l’École des sciences politiques de Paris. Oui, dans ma famille, la politique provinciale, nationale et internationale est importante et se trouve fréquemment au cœur de débats animés, mais de là à faire le saut dans ce domaine !

Curieuse et flattée par cette proposition surprenante, je suis allée rencontrer les gens du parti. Je me suis présentée à ce rendez-vous pleine de doutes. Il devait forcément y avoir erreur sur la personne, ils le réaliseraient bien vite ! Les formules de politesse usuelles faites, je n’ai pu m’empêcher de leur demander : « Pourquoi moi ? »

Leurs devoirs étaient bien faits et ils connaissaient parfaitement leur sujet : ma carrière d’artiste en France, aux États-Unis et au Québec, les nombreuses cordes à mon arc, mes engagements caritatifs depuis des années, mon sens de la communication, mon professionnalisme et même mes opinions sur Julie la Pie ! J’étais stupéfaite pour ne pas dire flabergastée

Même s’ils m’avaient rassurée et encouragée de façon tangible et concrète, je doutais encore et je ne me sentais pas à la hauteur… Je n’y croyais pas. Est-ce qu’un homme dans une situation semblable aurait réagi de la même façon ? Probablement pas !

Mon amie Isabelle Hudon, maintenant ambassadrice du Canada en France, m’a souvent dit ceci et Sheryl Sandberg tient des propos semblables dans son livre Lean In (En avant toutes).

Nous, les femmes, avons souvent tendance à nous excuser et à prétexter un manque d’expertise, alors que les hommes vont sauter sur l’occasion sans se poser maintes questions sur leurs compétences.

Si nous voulons un jour atteindre la parité, il faudrait arrêter d’avoir ce réflexe ! Rares sont les boulots faits sur mesure et cela ne veut pas dire qu’on n’en a pas les capacités, bien au contraire ! Il faut avoir du guts et de l’ambition. J’en ai à revendre et pourtant, doute, quand tu nous tiens…

J’ai souri en regardant Tout le monde en parle dimanche dernier. Mme Marois évoquait le fait que les femmes sont moins préparées à occuper des fonctions dans le domaine public que les hommes. Bien souvent, elles ne savent pas si elles seront capables de relever un tel défi, même si elles ont les compétences. 

Quant à Yolande James, elle parlait de sa journée de prestation de serment comme probablement l’une des plus stressantes de sa vie ! Elle doutait encore… Allait-elle faire l’affaire, être à la hauteur ? Méritait-elle vraiment sa place ? Plus nous, les femmes, aurons de modèles féminins, plus il sera facile de nous affranchir de cet atavisme.

Après une heure de discussion fort intéressante au cours de laquelle j’ai posé de nombreuses questions, je suis repartie, promettant une réponse dans les plus brefs délais.

Je savais au fond de moi-même qu’une telle aventure n’était pas faite pour moi. Du moins, pas pour l’instant.

Quelques jours plus tard, je les remerciais et déclinais poliment l’offre. La passion de mon métier artistique prime largement et celle de ma famille et de mes jeunes enfants, encore plus.

Mais sait-on jamais de quoi sera fait l’avenir ?

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