crise à Hong Kong

Des militants prodémocratie arrêtés la veille d’une grande manifestation

Plusieurs militants et députés prodémocratie connus ont été appréhendés et mis en accusation hier à Hong Kong en raison de leur rôle allégué dans le mouvement de contestation qui secoue l’ex-colonie britannique depuis près de trois mois.

Joshua Wong, l’une des cibles de la répression, a été amené de force par des policiers à l’aube et avisé qu’il devrait faire face à la justice pour avoir organisé une manifestation non autorisée en juin devant le quartier général de la police.

L’homme de 23 ans, qui s’était d’abord fait connaître en 2014 durant une autre période de contestation, s’est empressé de dénoncer la situation sur son compte Twitter après avoir été libéré en après-midi.

« Mon arrestation démontre que le gouvernement entend répondre à notre demande de dialogue avec des bâtons, des gaz lacrymogènes et des arrestations massives. Notre droit de libre association et d’autres droits fondamentaux s’érodent. »

— Joshua Wong, militant prodémocratie

Le militant a précisé dans la foulée qu’il était « complètement ridicule » que les autorités cherchent à le dépeindre comme l’un des responsables du mouvement actuel, puisque celui-ci « n’a pas de dirigeant ».

Près d’une dizaine de personnalités connues ont été arrêtées hier après que le gouvernement eut annoncé qu’il refusait, pour des raisons de sécurité, d’autoriser une nouvelle manifestation d’envergure prévue aujourd’hui par le Front civil des droits de l’homme, une association non violente.

Plus tôt cette semaine, l’un des dirigeants de l’association en question, Jimmy Sham, a déclaré qu’il avait été attaqué dans un restaurant par des hommes masqués armés d’une batte de baseball et d’un couteau.

« Faire monter la pression »

Gina Tam, spécialiste de la Chine rattachée à l’Université Trinity, au Texas, estime que les dirigeants chinois cherchent « clairement » par ces nouvelles arrestations à « faire monter la pression » sur les manifestants et favoriser l’effritement du mouvement de contestation.

Il a pris naissance en juin après que le gouvernement local eut tenté d’introduire une loi devant faciliter l’extradition vers la Chine de résidants recherchés de Hong Kong.

Les tensions n’ont cessé de monter depuis et ont débouché à plusieurs reprises sur des affrontements violents entre forces de l’ordre et jeunes manifestants furieux.

Mme Tam note que le mouvement, comme le soulignait hier Joshua Wong, n’a pas de dirigeant reconnu et traduit une colère populaire largement répandue.

En cherchant à suggérer le contraire, Pékin espère renforcer l’idée que Hong Kong fait face à un noyau de manipulateurs appuyés de l’étranger qui contrôlent la foule, dit-elle.

« Soit c’est ce qu’ils croient vraiment, ce qui démontrerait leur niveau de déconnexion avec la population, soit c’est ce qu’ils veulent faire croire », note Mme Tam, qui voit mal en quoi les dernières arrestations sont susceptibles d’endiguer la crise.

« Il y a déjà eu 900 arrestations d’individus inconnus. Ce sont plutôt celles-là qui auraient découragé la population, si c’était susceptible de fonctionner. » — Gina Tam, spécialiste de la Chine

En plus d’accroître la répression, le régime chinois continue de laisser planer la menace d’une intervention militaire par l’entremise des troupes déployées dans l’ex-colonie.

« Si la situation continue de dégénérer et que la violence et les troubles prennent une ampleur incontrôlable en raison de l’action de fauteurs de troubles sécessionnistes, les forces armées […] n’auront pas de raison de demeurer passives », a souligné cette semaine le China Daily.

Bien qu’elle prévienne que « rien n’est impossible » dans la crise actuelle, Mme Tam pense qu’une intervention militaire apparaît improbable à ce stade.

L’attention accordée à la possibilité d’une telle action ne doit pas faire oublier que la violence sur le terrain atteint déjà des niveaux extrêmement préoccupants, relève l’universitaire, qui évoque notamment le rôle joué par des voyous liés au crime organisé dans la répression en cours.

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