Finances personnelles

Courtiers à tout faire

Cellulaires, soins de santé, internet, résidences pour retraités. Il y a aujourd’hui bien des domaines insoupçonnés où des courtiers se proposent de défricher pour vous les offres sur le marché. Pour le plus grand bien de votre portefeuille, si vous trouvez le bon.

UN DOSSIER DE KARIM BENESSAIEH

Résidences pour retraités
« Ce n’est pas l’avenir, c’est le présent ! »

Connaissez-vous le coût moyen d’un logement en résidence privée dans votre région ? Pourriez-vous trouver les bons établissements et éviter les exploiteurs ? Quels services pourrez-vous obtenir ? Chaque année au Québec, sans nécessairement avoir toutes ces réponses, des dizaines de milliers de personnes âgées décident d’emménager dans une résidence pour retraités. D’où la popularité croissante d’un type bien précis de courtier, le « conseiller en résidences pour personnes âgées ».

17,9 %

Pourcentage des aînés québécois de 75 ans et plus habitant en résidence. Dans le reste du Canada, ce taux est au plus de 9,1 %.

1 327 890

Nombre de Québécois de 65 ans et plus

1853

Nombre de résidences privées pour aînés (RPA) au Québec

116 667

Nombre total d’unités privées de logement en résidence

« Chercher une résidence, ce n’est pas une affaire qu’on fait souvent dans une vie. Les gens me disent que mon domaine, conseiller en résidences pour retraités, c’est l’avenir. Ce n’est pas l’avenir, c’est le présent ! »

— Claude Paré, président et fondateur de Visavie

82 ans

Âge moyen des locataires dans les résidences privées

1740 $

Coût mensuel moyen d’un logement en résidence à Montréal

3200 $

Loyer moyen « avec soins assidus » dans les résidences du Québec

À la charge des résidences

Depuis qu’il a fondé Visavie en 1988, le Montréalais Claude Paré a peu à peu vu une vingtaine d’autres entreprises offrir leurs services pour aider les personnes âgées à trouver une résidence adaptée. Parmi ces conseillers plus récents : Hébergement Eureka, fondé à Québec en 2014 par Justin Hénault, qui compte une quinzaine d’années d’expérience dans ce secteur. Visavie aide environ 1500 personnes, tandis qu’Hébergement Eureka compte quelque 200 clients par année. Les deux hommes ont comme principe commun de ne pas être affiliés aux résidences qu’ils conseillent, « pour éviter les conflits d’intérêts », précise M. Hénault. Dans les deux cas, le recours à leurs services ne coûte pas un cent aux clients. « On a une entente de service avec les résidences : quand on leur recommande des clients, ce sont elles qui nous rémunèrent, explique le PDG d’Hébergement Eureka. L’avantage pour les résidences, c’est que le client est “préqualifié”, on a discuté avec lui, on connaît ses besoins, il est plus intéressant. »

Qui ?

Dans les deux tiers des cas, ce sont les enfants ou les proches des personnes âgées qui contactent les conseillers. « Ça arrive souvent après un événement déclencheur, une complication à la suite d’une hospitalisation, une poêle oubliée sur la cuisinière, dit M. Paré. Les gens sont un peu pris au dépourvu, c’est soudain. » Quand ce sont les personnes âgées elles-mêmes qui prennent les devants, il s’agit souvent de ce qu’il appelle « les autonomes tannés ». « Tannés de déblayer la neige, de tondre la pelouse : ils estiment avoir gagné le droit d’avoir un break. »

« L’image qu’on avait des résidences, des mouroirs où on ne fait que jouer au bingo, ce n’est plus ça. Aujourd’hui, il y a des vins et mfromages, des conférences, des sorties, des croisières dans le Sud. »

— Justin Hénault, directeur et conseiller en hébergement chez Hébergement Eureka

Répartition des logements en résidence

Autonomes : 7 %

Semi-autonomes : 63 %

Autonomes et semi-autonomes : 30 %

Les services

La première étape, cruciale, c’est l’entrevue avec les futurs résidants. « On va prendre le temps d’évaluer leurs besoins, leurs attentes, leur budget, pour les orienter vers des résidences adaptées », indique M. Hénault. Au-delà de la simple entrevue, M. Paré explique évaluer lui-même certaines caractéristiques, comme l’autonomie de la personne âgée, la présence de la famille ou l’état de son logement actuel.

Services offerts, en pourcentage des résidences

Loisirs : 96 %

Aide domestique : 96 %

Assistance personnelle : 91 %

Trois repas par jour : 67 %

Soins infirmiers : 54 %

Services médicaux sur place : 45 %

La sélection

Sur quels critères se basent les conseillers pour choisir une résidence en particulier ? Il n’existe pas de classement formel établi par un organisme indépendant, de sorte qu’ils doivent compiler eux-mêmes les forces et faiblesses de chaque établissement. « On les visite, on est en contact avec les organismes d’aide aux aînés, les gens qu’on a recommandés, explique M. Paré. On n’est pas à l’abri du vent, on peut m’en passer une, mais pas deux… » Chez Hébergement Eureka, Justin Hénault assure faire un suivi rigoureux auprès des clients : ils reçoivent tous un appel trois mois après qu’ils ont emménagé dans leur nouvelle résidence. « Je leur pose des questions sur la propreté, la qualité de la nourriture… Si je vois des choses qui témoignent d’une mauvaise gestion, comme le fait que trois réceptionnistes aient défilé en moins de quatre mois, je prends note. »

Sources : Statistique Canada, SCHL rapport 2017, rapport spécial du Protecteur du citoyen

Télécoms
Les traqueurs de forfaits

Les consommateurs à l’affût le savent bien, les fournisseurs de services de télécommunications, cellulaire, internet ou télé, affichent rarement leurs meilleurs prix. Heureusement, il existe quelques conseillers spécialisés qui épluchent à temps plein les offres. Nous en avons rencontré deux, les fondateurs de TelTam et de PlanHub. Quatre questions pour comprendre leur travail.

Quelle est leur spécialité ?

Nadir Marcos a lancé le site PlanHub en 2015, axé autour d’un moteur de recherche permettant de comparer les forfaits de téléphone cellulaire offerts au Québec. On y entre le nombre de minutes d’appel et les données désirées, on précise si on apporte son propre téléphone ou si on veut en acheter un, et le site fournit une liste de fournisseurs, du moins cher au plus cher. Dans les prochains mois, PlanHub pourrait évoluer vers un modèle plus personnalisé, où on offrira un service de courtier en bonne et due forme.

Rolf Tam, fondateur en 2014 et chef des opérations de TelTam, se décrit comme un « courtier en télécommunications pour les services résidentiels ». Essentiellement, son travail consiste à négocier et à dénicher les meilleurs forfaits combinant l’internet, le téléphone fixe et la télédistribution. Si son site contient quelques conseils, c’est par le contact direct avec les clients qu’il effectue son travail.

Où trouvent-ils les meilleurs prix ?

Rolf Tam affirme avoir sa « propre sauce spéciale » pour débusquer les meilleurs forfaits résidentiels. « L’essentiel est de savoir où aller chercher. Ce n’est pas seulement quoi dire quand on négocie, c’est comment le dire », indique-t-il. Ses services sont offerts de deux manières : soit il négocie au nom de son client auprès du fournisseur actuel, soit il propose un autre fournisseur. Dans ce dernier cas, son travail est facilité par le fait que la plupart des entreprises offrent des forfaits très avantageux aux nouveaux clients. Il combine parfois les deux méthodes, précise-t-il. « Je regarde sur le marché ce que les autres fournisseurs offrent et je retourne au fournisseur actuel pour lui présenter les chiffres. S’il ne peut accoter, on va voir ailleurs. » Pour les offres aux nouveaux abonnés, il affirme avoir des sources bien placées chez les fournisseurs. « Ils ont des tarifs qui ne sont donnés qu’aux nouveaux clients mais qu’ils ne peuvent pas afficher. »

Nadir Marcos, lui, compile soigneusement les offres affichées de téléphone cellulaire des fournisseurs. L’exercice est tellement laborieux que ces mêmes fournisseurs utilisent les services de PlanHub pour connaître les tarifs de leurs concurrents, affirme-t-il. Pour les clients, le moteur de recherche est évidemment plus pratique qu’une longue tournée des sites internet pour trouver le bon forfait.

Comment monnaient-ils leurs services ?

PlanHub offre aux fournisseurs de mettre un lien direct sur les résultats de recherche vers leur propre site – ce qui n’influe en rien sur les options proposées au client, assure M. Marcos. À moyen terme, il espère tirer des revenus d’un service de courtage plus formel.

Chez TelTam, on facture une commission de 20 à 30 % des économies qu’on a réussi à obtenir en négociant à la place du client. Quand il y a changement de fournisseur, c’est la nouvelle entreprise choisie qui verse une commission.

Y a-t-il vraiment des économies à réaliser pour le client ?

Oui, répondent sans hésiter les deux courtiers. « J’ai déjà aidé un client à économiser 1000 $ par année », assure M. Tam. S’il reconnaît qu’il s’agit d’un exemple particulièrement spectaculaire, il estime que la majorité de ses clients économisent « entre 250 et 300 $ » annuellement quand ils recourent à ses services. Ce ne sont pas tant les forfaits officiels affichés qui sont différents d’une entreprise à l’autre que le fait de négocier âprement et d’utiliser leurs incitatifs pour les nouveaux clients, explique-t-il. Dans certaines situations, il ne s’agit pas tant d’économiser que d’obtenir plus de services au même prix.

Pour les forfaits cellulaires, on ne dispose évidemment pas chez PlanHub d’exemples aussi précis, puisque les clients font eux-mêmes les démarches pour contacter les fournisseurs. L’utilité du site est toutefois éloquente, précise M. Marcos, puisqu’il compte près de 200 000 visiteurs par mois. Il est facile de le mettre à l’épreuve : pour un forfait avec appels illimités et 8 Go de données avec son propre téléphone, par exemple, on passe de 49 $ chez Koodo à 62 $ chez Telus. La différence est de 156 $ par année.

Un courtier à votre santé

Même si le privé est très loin d’occuper une place aussi importante dans le système de santé au Québec qu’aux États-Unis, quelques courtiers et conseillers y proposent leurs services. Que ce soit pour une intervention chirurgicale à Cuba ou pour répertorier les ressources médicales, deux entreprises en particulier offrent l’ultime fantasme du patient québécois : réduire, voire éliminer l’attente.

« Deux fois moins cher »

Depuis 2007, Services Santé International SSI (Servimed), entreprise de Québec, s’est spécialisée dans un créneau bien précis : proposer aux Québécois un large éventail d’interventions chirurgicales et de traitements offerts à Cuba. On compterait une quinzaine d’entreprises dites de « tourisme de santé » comme SSI au Canada. L’offre va de la chirurgie bariatrique aux soins dentaires en passant par les traitements contre la calvitie, la désintoxication, la chirurgie esthétique et l’orthopédie.

Les arguments d’une agence comme SSI sont simples : les soins à Cuba ont bonne réputation, l’attente y est minime et « on parle de coûts deux fois plus bas », indique Alain Leclerc, président. Quelque 200 Québécois utilisent chaque année les services de SSI où, pour 485 $, on guide le patient dans le système de santé cubain. « Ce qu’on offre, c’est clés en main : un accompagnement complet, de l’élaboration du dossier clinique à la réception, et la traduction entre l’espagnol et le français », dit M. Leclerc.

Une des critiques le plus souvent évoquées contre le tourisme médical, c’est l’absence de suivi après l’intervention. Évidemment, les médecins cubains ont une disponibilité toute relative une fois le patient rentré au Québec. Et une agence comme SSI ne peut s’engager à garantir le succès d’une intervention. « Ce serait impossible, dit le président. Mais quand la personne revient, elle n’est pas laissée à elle-même : on garde le lien avec les médecins cubains, on demeure des intermédiaires, on assure un suivi pendant cinq ans. »

Il défend en outre l’éthique de ce type de services, estimant qu’ils sont à l’avantage de Cuba et des patients québécois.

« L’argent payé sert au système public à Cuba et ce sont des interventions en moins dans le système québécois. On se trouve à aider les gens ici et les gens à Cuba. »

— Alain Leclerc, président de Services Santé International SSI

Un carrefour de la santé

Chez Clinia, on ne manque pas d’ambition : on veut non seulement répertorier à terme toutes les ressources en santé du Canada, publiques comme privées, mais également offrir la prise de rendez-vous, les prix et des évaluations des établissements basées sur les commentaires des usagers. Pour l’instant, la plateforme est tout de même assez complète : on peut y fouiller par mot-clé, selon le code postal, par spécialité ou par service dans 9000 ressources québécoises, réparties dans 65 catégories. Les résultats de recherche présentent les horaires des établissements, une brève fiche descriptive et l’accessibilité par les transports en commun ou la présence de stationnement.

Vous cherchez une clinique sans rendez-vous dans votre quartier ? On entre le code postal et une liste d’établissements avec les horaires, les coordonnées et les langues parlées apparaît. Vous cherchez un physiothérapeute ? La fiche est plus longue, avec tous les services offerts et, dans certains cas, la possibilité de prendre rendez-vous en ligne.

« Notre grand avantage sur une recherche Google, c’est que vous n’aurez pas à aller dans chaque site, vous voyez les détails importants des cliniques et vous pouvez entrer en contact rapidement. »

— Simon Bédard, PDG de Clinia

Les possibilités de revenus pour une plateforme de ce type sont immenses : on offrira par exemple aux établissements la possibilité d’être mis en évidence dans les résultats de recherche, sans nuire à leur pertinence, promet le PDG. « Une clinique sans rendez-vous ne paiera pas pour ces services, mais les cliniques privées, les dentistes, les physiothérapeutes seraient intéressés. »

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