Quatre conséquences appréhendées du réchauffement climatique

OCÉANS MALMENÉS

Les océans ont absorbé environ un quart des gaz à effet de serre produits par les humains depuis les années 80. Résultat : ils sont plus chauds, plus acides et moins salés. La concentration d’oxygène dans les milieux marins a baissé de 2 % en 60 ans, et devrait perdre 3 ou 4 degrés supplémentaires si les émissions de CO2 restent au même niveau.

CLIMAT DÉTRAQUÉ

La fréquence, l’intensité et l’étendue des vagues de chaleur marines comme celles qui ont ravagé la Grande Barrière de corail australienne ont augmenté. Les coraux, dont un demi-milliard de personnes dépendent pour leur nourriture et leur protection, ne devraient pas survivre à un réchauffement de surface de 2 °C comparé aux niveaux préindustriels. Un doublement des fréquences de phénomènes El Niño extrêmes – qui déclenchent des incendies de forêt, provoquent des maladies et ont des effets sur les cyclones – est attendu si les émissions ne sont pas réduites.

HAUSSE DU NIVEAU DES EAUX

Le niveau des océans va croître durant les siècles à venir, quelles que soient les mesures prises. Comparé avec la fin du XXe siècle, le niveau des océans devrait augmenter de 43 cm environ (29-59 cm) d’ici 2100 si le réchauffement global est maintenu à 2 °C. Il augmentera de 84 cm (61-110 cm) si les tendances actuelles se poursuivent, qui pourraient aboutir à un réchauffement global de 3 °C ou 4 °C. Au XXIIe siècle, le rythme d’élévation du niveau des mers pourraient s’accroître, de 3,6 mm par an aujourd’hui, à « plusieurs centimètres ». Les dommages causés par les inondations pourraient augmenter de 100 à 1000 fois d’ici 2100.

FONTE DES GLACES

Les calottes glaciaires en Antarctique et au Groenland ont perdu en moyenne 430 milliards de tonnes chaque année depuis 2006, devenant la principale source de la hausse du niveau des océans. Les quantités d’eau découlant de la fonte des glaciers vont atteindre un pic, puis vont décliner autour de 2100. Partout dans le monde, plus de deux milliards de personnes dépendent des glaciers pour leur eau potable. Les glaciers situés à basse altitude, comme en Europe centrale, dans le Caucase, l’Asie du Nord et la Scandinavie, devraient perdre plus de 80 % de leur volume d’ici 2100.

projet de rapport du GIEC

Les océans en passe de devenir nos pires ennemis

Les océans, sources de vie sur Terre, pourraient devenir nos pires ennemis à l’échelle mondiale si rien n’est fait pour donner un grand coup de frein aux émissions de gaz à effet de serre, selon un projet de rapport obtenu en exclusivité par l’AFP. Les réserves de poissons pourraient décliner, les dégâts causés par les cyclones, se multiplier et 280 millions de personnes seraient déplacées à cause de la hausse du niveau des mers, selon ce rapport spécial du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), qui sera officiellement dévoilé le 25 septembre à Monaco.

Hausse menaçante

Ce document riche de 900 pages qui se penche sur les océans et la cryosphère (banquise, glaciers, calottes polaires et sols gelés en permanence) est le quatrième rapport spécial de l’ONU publié en moins d’un an. Les précédents, tout aussi alarmants, portaient sur l’objectif de limitation à 1,5 °C du réchauffement climatique, sur la biodiversité et sur la gestion des terres et du système alimentaire mondial. Selon ce quatrième opus, qui compile les données scientifiques existantes et qui est vu comme une référence, la hausse du niveau des océans pourrait à terme déplacer 280 millions de personnes dans le monde. Et ce, dans l’hypothèse optimiste où le réchauffement climatique serait limité à 2 °C par rapport à l’ère préindustrielle.

Craintes d’inondations

Avec l’augmentation prévisible de la fréquence des cyclones, de nombreuses mégapoles proches des côtes, mais aussi de petites nations insulaires, seraient frappées d’inondations chaque année à partir de 2050, même dans les scénarios optimistes. « Quand vous observez l’instabilité politique déclenchée par des migrations de faible ampleur, je tremble en pensant à un monde où des dizaines de millions de personnes devraient quitter leurs terres avalées par l’océan », s’inquiète Ben Strauss, président-directeur de Climate Central, un institut de recherche établi aux États-Unis.

Pergélisol en danger

Le rapport prévoit en outre que de 30 % à 99 % du pergélisol, couche du sol gelée en théorie toute l’année, fondra d’ici 2100 si les émissions de gaz à effet de serre se poursuivent au rythme actuel. Le pergélisol de l’hémisphère Nord va libérer sous l’effet du dégel une « bombe carbone » faite de dioxyde de carbone (CO2) et de méthane (CH4), accélérant le réchauffement.

Trop d’eau

Des phénomènes, déjà en cours, pourraient aussi mener à une diminution continue des réserves de poissons, dont dépendent de nombreuses populations pour se nourrir. Les dommages causés par les inondations pourraient être multipliés par 100, voire jusqu’à 1000 d’ici 2100. La fonte des glaciers provoquée par le réchauffement climatique va donner trop d’eau douce, puis trop peu, à des milliards de personnes qui en dépendent, pointe aussi un « résumé pour décideurs » provisoire qui sera discuté ligne par ligne par les représentants des pays membres du GIEC, réunis à Monaco à partir du 20 septembre. Selon le rapport, les hausses des niveaux de la mer au XXIIe siècle « pourraient dépasser plusieurs centimètres par an », soit environ cent fois plus qu’aujourd’hui. Si l’augmentation des températures est de 2 °C en 2100, ce sera le début d’une « course en avant » dans la montée des mers, avertit Ben Strauss.

Pays frileux

La publication de ce rapport arrivera après la tenue à New York, le 23 septembre, d’un sommet mondial pour le climat convoqué par le secrétaire général de l’ONU, António Guterres. Il veut obtenir des engagements plus forts des pays pour réduire leurs émissions de CO2 alors qu’au rythme actuel, elles conduiraient à un réchauffement climatique de 2 à 3 °C d’ici la fin du siècle. Les experts craignent que la Chine, les États-Unis, l’Union européenne et l’Inde – les quatre principaux émetteurs de gaz à effet de serre – arrivent avec des promesses qui ne soient pas à la hauteur des enjeux. Des quatre grandes régions économiques représentant près de 60 % des émissions issues des combustibles fossiles, aucune ne semble prête à annoncer des objectifs plus ambitieux pour réduire les émissions de son économie.

Retrait américain

Donald Trump met à bas la politique climatique de son prédécesseur Barack Obama et souhaite que les États-Unis quittent l’accord de Paris de 2015. Un accord qui vise à maintenir l’augmentation moyenne de la température bien en dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels, et autant que possible à 1,5 °C. L’Inde est de son côté en train de développer rapidement l’énergie solaire, mais continue d’accroître ses capacités charbonnières. L’Union européenne tend vers un « objectif de neutralité » carbone à atteindre pour 2050, mais plusieurs États membres rechignent à s’engager.

Signaux contradictoires de la Chine

La Chine, qui émet presque autant de CO2 que les États-Unis, l’Union européenne et l’Inde combinés, envoie des signaux contradictoires. « L’attention de Pékin s’éloigne progressivement des enjeux environnementaux et des changements climatiques », déclare Li Shuo, analyste de Greenpeace International. Il l’explique par l’inquiétude suscitée par le ralentissement de l’économie chinoise et la guerre commerciale avec les États-Unis. Shanghai, Ningbo, Taizhou et une demi-douzaine de grandes villes côtières chinoises sont très vulnérables à la future élévation du niveau de la mer, qui devrait monter d’un mètre par rapport au niveau global de la fin du XXe siècle en cas de maintien des émissions de CO2.

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