COMMANDITÉ
À la rencontre de

SOPHIE CADIEUX

C’est avec un sourire dans la voix et le rire facile que Sophie Cadieux nous ouvre un pan de son intimité. Boulimique de travail, mue par une « énergie de fond » inépuisable, la comédienne revendique le droit d’être une femme multiple en laquelle force et fragilité se côtoient, sans contradiction. Entretien en toute simplicité.

Dans la quatrième et dernière saison de Lâcher prise, on retrouve Valérie dans une configuration familiale potentiellement plus compliquée que jamais. Peut-on espérer un dénouement en douceur ?

Je pense à « viser haut » et c’est ce que les personnages de Lâcher prise essaient de faire, mais, des fois, ils sont brutalement ramenés sur terre. Ce sera un dénouement à la hauteur du style de vie qu’ils ont !

Abandonner un personnage, c’est un deuil ou le signe du renouveau ?

Je crois beaucoup à l’idée selon laquelle on fait de la place pour de nouvelles choses quand on dit « au revoir ». C’est difficile de dire « au revoir » à Valérie et à la grande famille de la série, mais j’ai l’impression d’avoir fait une courbe avec ce personnage-là, c’est-à-dire d’avoir pris une femme dans un moment de grande crise et d’avoir fait le périple de sa reconstruction, et même au-delà : de l’avoir menée vers une vie plus paisible.

Qu’est-ce qu’elle vous lègue, Valérie Danault ?

Elle me lègue la fragilité, l’acceptation de la fragilité et aussi la volonté de prévenir le surmenage. Quand j’ai commencé à jouer ce rôle, je venais d’avoir un enfant et j’avais une énergie du tonnerre. Je me disais : « Il faut faire attention aux choses qui nous sont précieuses. » Il ne s’agit pas de réparer les pots cassés ; il faut mettre de l’énergie dans notre intimité et auprès des gens qu’on aime.

Comment votre vision du féminisme s’est-elle transformée au contact des personnages féminins forts dans lesquels vous vous glissez ?

Je ne me suis jamais trop posé la question du féminisme avant de devenir jeune adulte. J’ai abordé des femmes très complexes qui devaient s’affranchir, pas juste de leurs propres peurs, mais des peurs qui leur étaient inculquées par la société, par les structures.

« Ce qui est très beau dans le féminisme d’aujourd’hui, c’est qu’on a la liberté de vivre notre statut de femme comme bon nous semble et d’agir hors d’un seul et unique moule. C’est un féminisme entier, global, qui permet à la femme d’être tout ce qu’elle peut et non pas ce que les gens, les autres femmes attendent d’elle. » 

— Sophie Cadieux

Dans vos projets professionnels – qui sont très variés – , qu’est-ce qui vous anime ?

L’inconnu. Je n’aime pas être à mon aise. J’aime explorer et, chaque fois que j’ai l’impression que je ne peux pas saisir complètement ce qu’on me propose ou si ça me fait peur, d’instinct, je me dis que c’est pour moi. C’est cette pulsion d’aller vers l’inconfort et l’inconnu qui me pousse à accepter toutes sortes de choses. Un film de suspense et d’horreur – je vais faire ça –, ça m’excite parce que c’est un univers auquel je ne me suis pas encore frottée.

Êtes-vous tiraillée entre les univers du théâtre et de la télévision ?

Dans mes choix de projets, je dois faire des deuils. Mais je vais chercher mon énergie et mon inconfort dans l’équilibre de la pratique de ces deux univers-là, complémentaires : à la télé, il y a une implosion. Il s’agit d’un travail de précision et d’abandon, qui vise à permettre à la caméra d’entrer dans une grande intimité. Quand je suis sur scène, c’est une explosion où tout mon corps est impliqué. Ce sont deux langages de dynamitage !

« Viser haut » : qu’est-ce que ces mots évoquent pour vous ?

Mon amoureux est un grand rêveur, alors que je suis plus pragmatique. Le regarder être m’apprend à ne jamais accepter les choses telles qu’elles sont. J’aime bien penser que viser haut, c’est accepter qu’il y a une mouvance dans les choses.

UNE CHANSON QUE J’ÉCOUTE EN BOUCLE

Avec mon fils, la chanson de La Reine des Neiges, cette chanson qui pénètre dans tous les pores de notre peau.

MA PLUS GRANDE FORCE

Mon énergie vitale.

LE RÔLE QUE JE VOUDRAIS REJOUER

Sans être nostalgique, j’aimerais retrouver l’énergie folle et la légèreté de Clara, dans Rumeurs.

UN MOT QUE J’AIME

« Cramoisi », un mot plein de sonorités et de texture.

CE QUI ME MET EN COLÈRE

Le petit pouvoir.

UN FILM QUI M’A CHAVIRÉE

Uncut gems, dont le rythme anxiogène m’a rentré dans le corps.

UN TRAIT QUI ME FASCINE CHEZ LES AUTRES

La capacité à ne rien faire.

PLANIFIER OU IMPROVISER

Improviser dans la planification, dans les petits moments du quotidien.

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