Les quatre individus visés par l’enquête sur les fuites sont le député de Chomedey Guy Ouellette, Richard Despaties – les documents nous apprennent que les enquêteurs le soupçonnent d’être le fameux « Pierre » –, Lino Zambito et Stéphane Bonhomme, enquêteur de la Sûreté du Québec prêté à l’UPAC.
Les chefs allégués sont : abus de confiance, entrave à la justice, vol, recel et avoir influencé ou négocié une nomination, ou en faire le commerce.
Les déclarations sous serment rapportent que le même jour – le 14 juin 2017 –, Guy Ouellette, qui possède déjà au moins un téléphone cellulaire, active deux appareils mobiles prépayés. Une personne de l’entourage du député a toutefois confié à La Presse hier que ces deux appareils étaient destinés aux enfants d’Annie Trudel, une proche de M. Ouellette.
Le 29 juin, un juge autorise un mandat visant à obtenir tous les numéros entrants et sortants qui ont transité par les téléphones de MM. Ouellette, Zambito et Despaties depuis le 1er septembre 2015, jusqu’à ce jour pour le député et l’ex-entrepreneur, et jusqu’au 8 octobre 2016 pour le policier congédié.
Les enquêteurs des fuites tenteront ensuite d’établir des corrélations entre les échanges entre ces personnes et les fuites dans les médias. Ils fouilleront également les banques de données pour déterminer si Stéphane Bonhomme et Richard Despaties ont pu avoir accès à certains documents qui ont fait l’objet de fuites.
Le 24 juillet, rapportent les déclarations sous serment, l’enquêteur Stéphane Bonhomme fait une requête pour obtenir un nouveau téléphone de son employeur.
Il affirme avoir égaré le sien, deux jours plus tôt, et que lorsqu’il s’en est aperçu et qu’il est revenu sur ses pas, une voiture avait écrasé l’appareil.
Le 26 juillet, un lieutenant de l’UPAC échange des messages textes avec Annie Trudel qui, selon les documents, témoignent de « l’intérêt que manifeste Annie Trudel » à travailler pour l’UPAC.
Deux jours plus tard, un juge autorise des mandats pour obtenir les registres d’un téléphone appartenant à Stéphane Bonhomme et d’un autre relié à Guy Ouellette. Puis, le 2 août, des enquêteurs observent Richard Despaties fumant sur le balcon de sa résidence à Brossard.
Le 3 août, un juge signe des mandats accordant l’obtention des registres de téléphones appartenant à Guy Ouellette, Richard Despaties et Stéphane Bonhomme. Le 9 août, un juge autorise des mandats pour enregistrer les données de transmission de quatre téléphones, trois reliés à Guy Ouellette et un à Richard Despaties.
Entre le 1er septembre et le 5 octobre, d’autres mandats sont obtenus pour les téléphones de Richard Despaties et de Stéphane Bonhomme, y compris la conjointe de ce dernier, car les enquêteurs le soupçonnent visiblement d’utiliser l’appareil de cette dernière.
Le 14 août, un juge autorise un mandat permettant aux enquêteurs de perquisitionner subrepticement dans la résidence de Richard Despaties, mais ce mandat ne sera pas exécuté pour « des raisons opérationnelles ».
Le 15 août, un enquêteur vérifie une vidéo d’une caméra de surveillance d’une section des locaux de l’UPAC tournée le 28 juin précédent. À 10 h 25 ce jour-là, un appel de 31 secondes a été fait du bureau d’une comptable qui était absente vers le numéro de téléphone de Richard Despaties. L’enquêteur qui a visionné les images aperçoit Stéphane Bonhomme s’engager dans le corridor menant à ces locaux à 10 h 14 et le voit sortir à 10 h 26.
Prud’homme entre en scène
Durant la fin de semaine du 19 août, Guy Ouellette communique avec Martin Prud’homme, qui était alors directeur de la SQ. Selon les documents judiciaires, M. Ouellette l’informe qu’un policier de la SQ ne l’aime pas et que deux personnes sont mécontentes du déroulement de l’enquête de l’équipe mixte (relevant de la SQ) sur les allégations au SPVM.
Durant l’été, Martin Prud’homme a été avisé qu’une enquête criminelle sur les fuites avait été déclenchée et que Guy Ouellette était l’un des individus visés.
Selon les déclarations sous serment, M. Prud’homme avise alors le commissaire de l’UPAC – qui est aussi son beau-père – Robert Lafrenière. Ce dernier prévient à son tour l’inspecteur André Boulanger de l’UPAC le 21 août et lui dit que Martin Prud’homme est disponible pour rencontrer les enquêteurs des fuites.
Le 19 août, Annie Trudel échange des textos avec un lieutenant de l’UPAC et le prévient de fuites qui, selon elle, proviennent de l’UPAC.
Le 28 août, l’inspecteur Boulanger décide, selon les documents, que ce sont des enquêteurs de la GRC qui rencontreront Martin Prud’homme, par souci de transparence et pour « diminuer les risques que le réseautage de Guy Ouellette » n’ait un impact sur l’enquête.
Le même jour, les enquêteurs des fuites obtiennent de leurs collègues des Normes professionnelles de la SQ des images des caméras de surveillance du Centre St-Pierre à Montréal, d’où le fameux « Pierre » aurait appelé le journaliste Louis Lacroix le 8 avril 2016. Ces images, qui avaient été saisies durant l’enquête de 2016, ne révéleront rien.
Le 29 août, Annie Trudel écrit une nouvelle fois au lieutenant de l’UPAC et lui demande s’il y a toujours une enquête sur les fuites. Elle dénonce des fuites dans le dossier des compteurs d’eau à Montréal et montre du doigt l’UPAC.
Le 1er septembre, un juge autorise un mandat pour enregistrer les données de transmission sur le téléphone d’Annie Trudel.