L’ex-cadre de SNC-Lavalin Riadh Ben Aissa plaide coupable
Il a fini par avouer. Six ans après son arrestation, l’ancien haut dirigeant de SNC-Lavalin Riadh Ben Aissa a reconnu devant la cour hier qu’il avait utilisé un faux contrat pour acheminer en cachette 22,5 millions à l’ancien PDG du Centre universitaire de santé McGill (CUSM) Arthur Porter.
M. Ben Aissa a plaidé coupable à une accusation réduite d’usage de faux, en vertu d’une entente avec le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP).
Le faux contrat impliquait le versement de cet argent par SNC-Lavalin à un « agent commercial » qui devait aider l’entreprise québécoise dans un projet de construction en Algérie. En réalité, cet agent n’existait pas.
Le contrat servait à masquer le fait que l’argent était envoyé à une société fictive dans un paradis fiscal, contrôlée par Arthur Porter.
La thèse de la poursuite est que l’argent a été divisé entre M. Porter et son bras droit au CUSM, Yanai Elbaz. Un enquêteur de l’Unité permanente anticorruption (UPAC) avait déclaré à la commission Charbonneau qu’il s’agissait de la « plus grande fraude de corruption de l’histoire du Canada », au prorata de la valeur du contrat. M. Porter est mort avant d’être jugé, et Yanai Elbaz est toujours en attente de procès.
SNC-Lavalin avait remporté le lucratif contrat pour la construction du centre hospitalier, mais, selon un exposé conjoint des faits lu à la cour, M. Ben Aissa n’en a retiré aucun avantage personnellement.
L’ingénieur de formation faisait face à 15 autres chefs d’accusation depuis son arrestation en 2012. Ceux-ci ont été abandonnés par la poursuite en échange de sa reconnaissance de culpabilité.
La poursuite et la défense s’étaient entendues pour une suggestion commune de 51 mois de pénitencier. Mais compte tenu du fait que M. Ben Aissa a passé du temps en détention préventive en Suisse et au Canada dans des « conditions difficiles », et qu’il a ensuite été soumis à des conditions « très restrictives » lorsqu’on l’a remis en liberté avec un bracelet GPS à la cheville et des gardiens de sécurité privés (qu’il payait lui-même) pour surveiller ses déplacements, la cour a calculé qu’il ne lui restait qu’une seule journée de détention à purger.
Avant qu’on lui passe les menottes, la juge Hélène Morin s’est adressée à M. Ben Aissa.
« À titre de citoyenne, tout ce qui s’est passé à cette époque a jeté un grand discrédit sur SNC-Lavalin. Vous en êtes un peu responsable. »
— La juge Hélène Morin
Un autre accusé dans cette affaire, l’ancien vice-président aux finances de la division construction de SNC-Lavalin, Stéphane Roy, a été acquitté automatiquement hier parce que le Directeur des poursuites criminelles et pénales a annoncé qu’il ne présenterait pas de preuve contre lui.
Des années après son arrestation, M. Roy s’est réjoui de cette conclusion à sa sortie de la salle d’audience. Il fait toutefois toujours face à des accusations criminelles relativement aux aventures de SNC-Lavalin en Libye, dans la foulée d’une enquête de la GRC.
Dans le dossier du CUSM, l’ancien PDG de SNC-Lavalin Pierre Duhaime et l’ancien bras droit d’Arthur Porter Yanai Elbaz sont toujours en attente de procès.
L’enquête, lancée par l’escouade Marteau de la Sûreté du Québec qui allait ensuite être intégrée à l’Unité permanente anticorruption (UPAC), a mené les policiers québécois à tracer la course autour du monde de l’argent : des Bahamas à la Suisse en passant par le Royaume-Uni et d’autres pays.
Elle est aujourd’hui enseignée comme un cas type à l’École nationale de police.