Réseau express métropolitain

Des coûts et des revenus surprises

Hydro-Québec hérite d’une facture de plus liée au REM, tandis que le train de la Caisse de dépôt aura droit à des revenus additionnels, indiquent des documents du gouvernement du Québec.

Un dossier d’André Dubuc

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La facture d’Hydro-Québec gonfle de  43 millions

La contribution d’Hydro-Québec (HQ) dans le projet de train électrique de la Caisse de dépôt va devoir être plus élevée qu’on ne l’avait cru jusqu’ici, a appris La Presse.

La société de production et de distribution d’électricité va devoir mettre 43 millions de plus dans le projet, outre les 295 millions déjà annoncés.

L’information se trouve dans un décret gouvernemental publié mercredi, mais adopté le 21 mars. Il s’agit d’une aide financière qui sera versée à REM commandité inc., filiale en propriété exclusive de la Caisse. Selon le décret, elle sert à payer les coûts du matériel fixe nécessaire à l’électrification des services de transport.

Essentiellement, c’est le même argumentaire qui justifie l’aide de 295 millions d’Hydro-Québec au REM, une aide qui était déjà connue. 

« Cette contribution s’inscrit dans le cadre d’une entente commerciale entre Hydro-Québec et la société exploitante du REM qui sera cliente d’Hydro-Québec pour l’approvisionnement du projet en électricité. »

— Le gouvernement du Québec dans son dernier budget 

Québec insistait pour dire que cette somme de 295 millions ne constituait pas une subvention, dans le budget 2017.

« L’entente d’aide financière prévoit également qu’Hydro-Québec prendra à sa charge, jusqu’à un maximum de 43 millions de dollars, les contributions financières normalement exigibles lors de demandes d’alimentation électrique en vertu des Conditions de service d’électricité puisque les modifications requises aux équipements électriques d’Hydro-Québec se qualifient à titre de matériel fixe nécessaire à l’électrification d’un projet de transports collectifs », explique dans un courriel Lynn St-Laurent, conseillère stratégique de la société d’État.

Pas un mot dans le budget

Le budget du 27 mars du gouvernement du Québec ne dit pas un mot sur cette contribution additionnelle de 43 millions exigée à HQ, pourtant votée six jours plus tôt. Les documents budgétaires fixent toujours le coût du projet à 6,325 milliards et la contribution d’HQ à 295 millions.

En ajoutant les 43 millions au coût du projet, celui-ci passe de 6,325 milliards à 6,368 milliards. En arrondissant, on ne parle plus d’un projet de 6,3, mais d’un projet de 6,4 milliards.

À la Caisse, on conteste vivement cette interprétation. Les 43 millions seront investis dans le réseau d’Hydro-Québec, insiste-t-on.

« Quand Hydro décide de faire des investissements dans les infrastructures pour desservir un client important comme une aluminerie, elle peut recharger ces coûts d’investissement dans leur réseau au client, explique Jean-Vincent Lacroix, porte-parole du REM. Dans le contexte du REM, comme ça s’inscrit dans leur politique d’électrification des transports, elle ne facturera pas le REM. »

M. Lacroix ajoute que la Caisse estime la facture d’électricité du REM à 555 millions pendant 30 ans.

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D’autres dépenses et des gains

Des sommes considérables ne sont pas prises en compte dans le coût du projet. En outre, le REM pourra toucher des revenus additionnels en redevances et des revenus de stationnement. Explications.

Gare et terminus d’autobus

La future gare de l’autoroute 40 qui permettra la correspondance entre le train de l’Est et le REM sera construite aux frais de l’Autorité régionale de transport métropolitain (ARTM). De fait, la somme est exclue du coût du projet de 6,325 milliards, tel qu’estimé par Québec et la Caisse de dépôt. C’est le même traitement pour les terminus d’autobus de la Rive-Sud, de Panama et de Fairview Pointe-Claire. Le REM prendra en charge leur construction. Par la suite, la gare de l’A40 sera revendue à l’ARTM. Dans le cas des terminus d’autobus, le REM en gardera la propriété, mais les louera à long terme à l’ARTM. Pour faire tout cela, le gouvernement verse à l’ARTM la somme de 195 millions. Par ailleurs, le gouvernement versera au REM 26 millions pour construire des bretelles d’autoroute sur l’A10, le pont d’étagement enjambant l’A10 et l’acquisition de l’antenne ferroviaire Saint-François, dans l’Ouest-de-l’Île, près de Doney. Cette somme de 26 millions est aussi exclue du coût officiel du train, « parce que les infrastructures reviennent au gouvernement », précise le porte-parole du REM, Jean-Vincent Lacroix.

Une taxe REM

Les propriétaires immobiliers qui construiront des bâtiments dans un rayon d’un kilomètre des stations du REM vont devoir payer une taxe spéciale, appelée « redevance de développement ». Cette taxe de 10 $ le pied carré s’applique sur les travaux d’une valeur excédant 750 000 $ et sera indexée. Cette franchise a pour but d’épargner les propriétaires de maisons unifamiliales. La taxe avait été annoncée il y a un an. On connaît maintenant son ampleur. Elle sera de 600 millions maximum sur la durée de vie utile du réseau de transport, soit 50 ans. Cette somme s’ajoutera aux revenus courants du REM, en plus de la contribution de 0,72 $ du passager-kilomètre que l’ARTM versera au REM. Cette contribution de 0,72 $ a été calculée en fonction d’un achalandage estimé de 550 millions de passagers-kilomètres par an. La contribution baissera si l’achalandage dépasse cette cible de 15 %. La redevance de développement n’est pas la même chose que la compensation de 512 millions liée à la plus-value foncière. La compensation s’applique aux bâtiments existants et est payée par Québec, tandis que la redevance s’applique aux nouvelles constructions.

Des stationnements payants ?

En acquérant la ligne de train de Deux-Montagnes (y compris le tunnel du mont Royal) pour 125,4 millions, le REM devient propriétaire de tous les stationnements incitatifs. La somme a été établie par un évaluateur indépendant. L’Autorité métropolitaine de transport (AMT) avait payé 97 millions au Canadien National en 2014 pour acquérir le même bien. En parallèle à cette transaction, le REM obtient la pleine latitude de tarifer les stationnements et de garder pour lui les revenus, explique-t-on à l’ARTM. Cette dernière estime à 7 millions par année les revenus des stationnements le long de la ligne de train. Le gouvernement a d’ailleurs accepté de dédommager l’ARTM pour la perte de ce revenu potentiel en lui versant justement 7 millions par année. L’Autorité utilisera cette somme pour le financement des autres services de transport collectif. « Le REM travaillera avec l’ARTM pour définir les orientations relativement aux stationnements pour inscrire ces orientations dans une vision globale incluant les autres services de transport », dit M. Lacroix.

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