McALLEN — Dans un nouveau coup de théâtre, Melania Trump s’est rendue hier à la frontière avec le Mexique pour rencontrer des enfants sans papiers, une visite préparée dans le plus grand secret tandis que son mari fait face à un barrage mondial de critiques pour avoir séparé plus de 2000 mineurs clandestins.
« Depuis combien de temps êtes-vous là ? D’où venez-vous ? » Souriante, la première dame est passée de classe en classe pendant un peu plus d’une heure dans un refuge de McAllen, grande ville texane, où les enfants lui avaient écrit « Bienvenue » sur un drapeau américain.
Une scène inimaginable la veille, avant que Donald Trump ne signe, dans un revirement fracassant, un décret mettant fin aux séparations qu’il avait lui-même encouragées avec sa politique de « tolérance zéro » face aux clandestins.
De l’aveu même du milliardaire, la discrète Melania Trump a joué un rôle dans cette décision, qui ne règle toutefois pas la question des plus de 2300 mineurs arrachés à leurs parents depuis la mise en œuvre de sa politique, début mai.
Quand retrouveront-ils leurs familles, s’interrogent depuis mercredi ONG et opposition démocrate.
Comment puis-je « aider à réunir ces enfants avec leurs familles aussi vite que possible ? », a demandé, comme en écho, Melania Trump au personnel du refuge, dans un rebondissement quasi surréaliste de cette controverse.
« Bouleversés »
Le centre Upbringing New Hope Children’s Shelter accueille une soixantaine de mineurs âgés de 5 à 17 ans, originaires du Honduras et du Salvador. La plupart sont des adolescents qui ont fait le voyage seuls depuis ces pays rongés par la violence. Six ont été séparés de leurs parents.
« Quand ils arrivent ici, ils sont souvent très bouleversés », a confié un responsable.
L’idée du voyage est venue « à 100 % » de Melania Trump, a précisé sa porte-parole, Stephanie Grisham, affirmant que son époux l’« a soutenue ».
Si l’opération préparée dans le plus grand secret a réussi son effet-choc, elle a été perturbée par les images de la première dame vêtue d’une veste marquée dans le dos des mots : « Je m’en fiche complètement, et vous ? » Une faute de goût, vu le contexte, qui a immédiatement enflammé les réseaux sociaux. Cela ne l’a cependant pas empêchée de porter la même veste à la sortie de l’avion, à son retour à Washington.
Sa porte-parole a assuré qu’« il n’y avait pas de message caché » derrière cette inscription.
« Bienvenue en Amérique »
Pleurs déchirants, images poignantes d’enfants dévastés, la politique fermement revendiquée dans un premier temps par la Maison-Blanche n’a pas tenu face à la tempête dans l’opinion publique, dénoncée par l’ONU, le pape, des pays européens et jusqu’au cœur même de ses rangs républicains.
Alors qu’il a souvent vanté par le passé ses nombreuses apparitions en une du Time, Donald Trump ne devrait pas afficher celle du prochain numéro, révélée hier et qui le montre dominant une fillette en larmes, dont la photo a largement contribué à alerter l’opinion, avec le simple titre : « Bienvenue en Amérique ».
Malgré son décret mettant fin aux séparations des familles, les critiques ne s’apaisaient pas, associations de défense des droits de l’homme et opposition démocrate dénonçant la solution apportée : les maintenir désormais en centre de rétention avec leurs parents pendant la durée des poursuites pénales.
Le ministère de la Santé (HHS) a lui annoncé avoir demandé au Pentagone de se préparer à héberger sur des bases militaires 20 000 enfants migrants entrés sur le territoire américain non accompagnés par des adultes.
Report d’un vote clé
Tentant d’agir de son côté sur ce sujet brûlant, le Congrès a une nouvelle fois buté sur l’immigration, avec le report d’un vote clé sur une réforme censée mettre un terme définitif aux séparations et réformant plus largement le système.
Majoritaires au Congrès, les républicains avaient soumis deux textes au vote hier.
Le premier, reflétant les positions les plus dures du parti, a été rejeté, comme attendu.
Dans un dernier effort pour évaluer ses chances de passage, les chefs républicains ont préféré attendre jusqu’à aujourd'hui pour soumettre le deuxième texte, tentant de réconcilier ailes dure et modérée républicaines profondément divisées sur le sujet.
Pas de suspense du côté des démocrates, qui ont promis de voter contre la loi républicaine à la Chambre. « Les républicains continuent d’être complices des atrocités de » Donald Trump, a asséné leur cheffe à la Chambre, Nancy Pelosi.