congédiement d’un lanceur d’alerte du ministère de l’agriculture

Une décision « personnellement autorisée » par le ministre

Réunis à Gatineau, les députés caquistes ont débattu du bien-fondé d’accorder ou non un droit acquis aux fonctionnaires en position d’autorité qui portent actuellement des signes religieux. Mais sur un autre front, c’est le ministre de l’Agriculture, André Lamontagne, qui a retenu l’attention. Il a défendu hier son choix d’avoir personnellement autorisé le congédiement d’un lanceur d’alerte dans son ministère.

Recherche sur les pesticides

Un agronome en « manque de loyauté »

Le ministre de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation, André Lamontagne, a personnellement autorisé le congédiement de l’agronome Louis Robert de son ministère jeudi dernier. Le fonctionnaire, qui y travaillait depuis 32 ans, a dénoncé par le passé à Radio-Canada « l’ingérence du privé dans la recherche publique sur les pesticides », a rapporté la société d’État. 

« La décision qui a été prise par le Ministère [de congédier le fonctionnaire] est une décision que j’ai personnellement autorisée à la lumière des informations que j’ai recueillies […]. C’est une décision que j’ai jugé importante à prendre », a dit M. Lamontagne hier à son arrivée au caucus de la CAQ, en Outaouais. 

Travaillant au bureau de Saint-Hyacinthe du ministère de l’Agriculture, Louis Robert a fourni par le passé à la télévision publique « des documents accablants » sur l’ingérence du privé dans la recherche publique sur les pesticides. Il était à l’époque « insatisfait de l’écoute de ses supérieurs », a écrit Radio-Canada. 

« En février 2018, vous avez fait preuve d’un manque de loyauté envers votre employeur en transmettant un document confidentiel au journaliste Thomas Gerbet. De plus, il s’agissait d’un geste planifié et volontaire », lui a reproché Alain Fournier, directeur général du développement régional au ministère de l’Agriculture, dans sa lettre de congédiement rendue publique hier par Radio-Canada. 

Signes religieux

La CAQ craint le congédiement d’une « madame Lazhar »

Qu’arriverait-il si une « madame Lazhar » (en référence au film de Philippe Farladeau sur un prof-immigrant exemplaire) portant le voile était congédiée à la suite de l’adoption du projet de loi du ministre Simon Jolin-Barrette sur la laïcité ? La question donne des maux de tête aux caquistes, qui ne s’entendaient pas hier sur le bien-fondé d’accorder un droit acquis aux enseignants portant actuellement un signe religieux.

Le projet de loi, qui interdira le port de signes religieux aux employés de l’État en position d’autorité (ce qui inclut les enseignants), « ne passera pas comme une lettre à la poste », a reconnu hier François Legault.

« Je comprends que certaines personnes sont racistes et voudraient que l’on bannisse tous les signes religieux du Québec, mais ce n’est pas notre approche. Nous avons choisi un compromis qui est bien plus [clément] que ce qu’on voit en France, par exemple », a-t-il poursuivi.

La députée d’Iberville, Claire Samson, a également affirmé que ses concitoyens lui avaient exprimé de vives réticences face à l’idée d’inclure « une clause grand-père », qui est notamment défendue par le Parti québécois. 

« Je sais que mes concitoyens ne souhaitent pas d’exceptions. En général, ils veulent qu’on règle [cet enjeu] une fois pour toutes. On a sorti les religions de nos écoles il y a 50 ans, ils ne veulent pas que ça revienne », a-t-elle affirmé hier. 

Téo Taxi

Legault espère qu’un entrepreneur ira « au bat »

Sur le plan économique, François Legault souhaite qu’un entrepreneur aille « au bat » pour investir « de son propre argent » afin d’acheter la division technologique de Téo Taxi, qui a mis fin à ses activités mardi. « Mais [pour sauver ces quelque] 20 emplois, la contribution du gouvernement sera limitée », a-t-il prévenu hier.

« S’il y avait un repreneur [pour la division technologique de Téo Taxi], on pourrait examiner la possibilité d’aider ce repreneur. Mais on veut [surtout] réorienter Investissement Québec pour créer des emplois de plus de 50 000 $ par année. Si on parle des chauffeurs de taxi à 15 $ de l’heure, ce ne sont pas des emplois à 50 000 $ », a dit M. Legault. 

Alors qu’il était récemment au Forum économique de Davos, où des entrepreneurs lui ont dit qu’ils investiraient dans des villes où il y a des étudiants et des travailleurs qualifiés, le premier ministre prédit qu’on « va vivre dans les prochaines années une grande transformation du marché de l’emploi ». 

« Les emplois où il n’y a pas beaucoup de valeur ajoutée, où on paie moins bien, tranquillement, ils vont disparaître », a-t-il dit. 

— Avec Denis Lessard, La Presse

Signes religieux

Les élus solidaires serrent les rangs malgré certains malaises

Québec — Les élus de Québec solidaire (QS) ont serré les rangs autour de la recommandation de la commission Bouchard-Taylor sur l’interdiction des signes religieux, hier. Mais le député Vincent Marissal a reconnu qu’il éprouvait un malaise à ce que sa mise en œuvre empêche une jeune élève en techniques policières de décrocher un emploi.

À son arrivée à une réunion du caucus solidaire, M. Marissal s’est dit favorable à ce que Québec interdise le port de signes religieux aux fonctionnaires avec un pouvoir de coercition comme les juges, les procureurs de la Couronne, les policiers et les gardiens de prison. C’est ce qu’avait prescrit la commission de consultation dans son rapport de 2008.

M. Marissal y voit une position de « compromis », à défaut d’une « solution idéale ». Il n’a pas caché son malaise devant les conséquences possibles d’une telle politique lorsqu’il a été questionné sur le cas de Sondos Lamrhari, une élève en techniques policières qui porte le hijab.

« On traversera le pont quand on sera à la rivière », a-t-il dit.

« Est-ce que je suis à l’aise avec le fait que quelqu’un ne puisse pas faire un job à cause de ça ? La réponse bien franche, c’est non, je ne suis pas à l’aise avec ça. »

— Vincent Marissal, député de Québec solidaire

Le gouvernement Legault présentera dans les prochaines semaines un projet de loi très attendu sur la laïcité. Il a déjà annoncé son intention de mettre en œuvre les recommandations de Bouchard-Taylor et d’élargir l’interdiction des signes religieux aux enseignants, ce à quoi Québec solidaire s’oppose fermement.

QS se trouve cependant dans une situation particulière : ses membres ont entrepris en décembre de réviser la position du parti sur la laïcité. Ils prendront une décision lors d’un conseil national en mars. On devrait alors se trouver en plein débat parlementaire sur le projet de loi caquiste.

Tous les députés solidaires rencontrés hier ont dit approuver la position actuelle du parti, malgré le débat interne. La co-porte-parole Manon Massé fait valoir que, de toute manière, aucun policier et aucun juge ne porte un signe religieux. Il n’est donc pas question de mettre à pied qui que ce soit.

« Chez nous, avec Bouchard-Taylor, personne ne perd son emploi. »

— Manon Massé, co-porte-parole de Québec solidaire

En revanche, QS s’oppose bec et ongles à ce que des enseignants ou des éducatrices en garderie soient ciblés par l’interdiction, a-t-elle rappelé.

Au passage, elle a noté que le Parti libéral est lui aussi tiraillé sur la laïcité. Certains élus du PLQ souhaitent en effet se rallier au rapport Bouchard-Taylor.

« On n’est pas les seuls », a-t-elle lancé en boutade.

une loi-cadre sur le climat

Les députés solidaires se sont réunis hier pour préparer la rentrée parlementaire. L’explosive question de la laïcité ne se trouvait pas à l’ordre du jour.

C’est plutôt l’environnement qui sera le cheval de bataille de Québec solidaire au cours des prochains mois, comme il l’a été pendant les élections.

Mme Massé a présenté trois propositions au gouvernement Legault pour s’attaquer à la crise climatique.

Elle suggère à Québec d’adopter une loi-cadre sur le climat. Cette idée, défendue par le Parti québécois et par les initiateurs du Pacte, forcerait le gouvernement à tenir compte de l’impact de chacune de ses décisions sur la crise climatique.

Mme Massé propose aussi au gouvernement caquiste de réformer le Code de construction pour encourager l’utilisation du bois d’œuvre et de financer davantage les transports collectifs.

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