Nathalie Lasselin en quelques choix

deux livres

Voyage au centre de la Terre, de Jules Verne, et 1984, de George Orwell

Un film 

Femmes au bord de la crise de nerfs, du cinéaste espagnol Pedro Almodóvar

Un personnage historique

La pilote d’avion Amelia Earhart

Un personnage contemporain 

Le « savanturier » Bertrand Piccard

Une citation 

« La vie est charmante, c’est selon le verre par lequel on la regarde. » (Alexandre Dumas fils)

Une cause pour laquelle elle irait manifester  

La préservation de l’eau douce, potable. Sur sa pancarte, elle écrirait : « Ensemble, tout est possible. Une goutte d’eau à la fois. »

Personnalité de la semaine

Nathalie Lasselin

La cinéaste et exploratrice braquera sa caméra sous-marine sur le fleuve Saint-Laurent lors d’une plongée extrême afin que ses riverains le connaissent mieux et, espère-t-elle, en prennent soin. Nathalie Lasselin est notre personnalité de la semaine. 

Nathalie Lasselin le reconnaît : le fleuve Saint-Laurent n’est pas aussi spectaculaire à explorer, en plongée, que les eaux des mers du Sud remplies de coraux et de poissons multicolores. D’autant plus que dans la région de Montréal, il est gorgé des sédiments que lui apporte la rivière des Outaouais et qui lui donnent souvent l’allure d’un café au lait.

Mais il y a de jolies choses à voir, assure-t-elle. Des esturgeons, des nectures tachetés…

Et le connaître est crucial, ajoute la camérawoman, plongeuse et cinéaste récemment intronisée au Women Divers Hall of Fame, le temple de la renommée international des plongeuses. « Environ 80 % de l’eau qu’on boit provient du fleuve. Il faut en prendre soin. »

Le Saint-Laurent est le terrain de jeu et de travail de notre personnalité de la semaine, originaire du nord de la France – une ch’ti installée au Québec depuis longtemps, mais qui ne veut pas dire combien d’années exactement, précisant seulement que la première fois qu’elle est venue ici, on atterrissait à Mirabel…

Le fleuve, elle y plonge, le filme. Bientôt, en septembre, elle partira en plongée continue sur 70 km, en une seule immersion, pour le découvrir sous toutes ses coutures, d’un bout à l’autre de l’île de Montréal.

Coup de foudre pour le québec

L’histoire de cette passionnée d’exploration commence par la rencontre, en France, d’un nouvel ami québécois qui lui donne envie, à 15 ans, de venir voir ce qui se passe ici. Quand elle arrive pour un court voyage, le sentiment qu’ici tout est possible s’installe. « Je me suis dit tout de suite : “Je me vois vivre ici.” »

Elle rentre en France en disant à ses parents qu’elle veut repartir pour le Canada. Le couple, propriétaire d’une boucherie-charcuterie et boutique de traiteur à Maubeuge, lui donne son accord à une condition : elle doit d’abord obtenir son baccalauréat.

Ce qu’elle fait, sans jamais oublier son projet de partir pour le Québec, où elle s’installe avec ses connaissances et son amour du cinéma. Elle obtient un poste à l’ONF comme assistante-camérawoman et assistante photo.

Sa carrière est lancée.

Elle filme, voyage, découvre, sillonne la planète. Elle apporte sa caméra de documentariste partout. Un jour, elle essaie la plongée. Coup de foudre. Elle commence à filmer sous l’eau. « La plongée a changé ma vie. »

La planète vue des profondeurs

Cette spécialité l’amènera pratiquement partout, sur tous les continents, à la découverte d’épaves, d’animaux, de profondeurs inconnues, même sous les icebergs, sous la banquise, dans l’Arctique. Elle y amène d’autres plongeurs, leur apprend ce qu’il y a au-delà de nos certitudes. « Il y a tant de choses de la Terre qu’on ne connaît pas. »

Son objectif à travers tout cela : « Mieux comprendre la planète. » « On dirait que ce qu’on ne voit pas n’existe pas. Donc je me dis qu’il faut aider tout le monde à la voir. »

Sa vie, c’est désormais la transmission de ces images, les conférences, la formation.

Et c’est pourquoi le fleuve Saint-Laurent l’intéresse tant. Il est là, mais on ne le voit plus. Or elle veut qu’on s’en préoccupe. Si on observait de nos propres yeux les détritus qui s’accumulent sur les berges à certains endroits, micro-versions de ces continents de plastique qui nous horrifient tant, peut-être ferait-on des choix de consommation différents, poserait-on des gestes différents. Condoms, applicateurs de tampons et autres déchets aboutissent dans le fleuve. Le réalise-t-on quand on jette toutes sortes de choses dans la toilette ?

Les filtres ne bloquent pas tout, dit-elle. Bien des horreurs se retrouvent dans la nature. Quand on dit de ne rien jeter dans la cuvette, c’est carrément pour ça…

Nathalie Lasselin est aujourd’hui engagée dans un projet scientifique avec six chercheurs pour analyser ce qui se retrouve dans notre grand cours d’eau. Hormones, herbicides, pesticides, ibuprofène, antibiotiques, microparticules de plastique… « On va chercher 75 composites », dit-elle. C’est elle qui ira chercher les échantillons à analyser. Les résultats devraient arriver à la fin de l’année. « Ce sera le portrait du fleuve. » On connaîtra sa santé, ses faiblesses, sa vie.

« Et quand on voit les choses, dit-elle, on ne peut plus fermer les yeux. »

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