Survivre ou non à une infidélité

Se donner une autre chance

Aux États-Unis, un couple sur deux se redonne une chance après une infidélité, souligne le psychologue François St Père. Au Québec, ce taux atteindrait 70 %, d’après un sondage qu’il avait mené. Par contre, les études ne démontrent pas si ces couples sont encore ensemble des années après l’adultère. D’ailleurs, Vicky aurait aussi donné une chance à son conjoint. « Après la naissance de mon enfant, j’étais dans le déni. Même s’il m’avait tout avoué, je ne l’aurais jamais quitté malgré tout ça, je pense. Je voulais ma famille. Mais sa décision était déjà prise », dit-elle.

Trois étapes

Certains facteurs favorisent la reconstruction du couple après une infidélité. Le couple peut même en sortir grandi et plus heureux qu’avant, souligne François St Père. Il explique que les chances de se reconstruire sont plus élevées si : 1. La personne qui a trompé a beaucoup de regrets et constate que sa relation parallèle n’était pas significative. 2. La personne qui a trompé constate à quel point son partenaire est important à ses yeux et lui témoigne de l’amour. 3. Les deux partenaires sont prêts à avoir une discussion sur ce qui n’allait pas avant, sur ce qu’ils peuvent faire pour améliorer la relation et s’appliquent à le faire. 

Presque inévitable

Si l’un des conjoints a développé un lien amoureux avec l’autre personne et s’est investi dans une relation parallèle à l’insu de son partenaire, l’infidélité n’est donc pas une simple histoire d’un soir avec un inconnu. Le cas d’une double trahison est aussi généralement fatal. Par exemple, si la maîtresse est la meilleure amie de la femme trompée. Il y a des cas où « c’était cette meilleure amie qui devait être présente à l’accouchement », signale François St Père. Cela est aussi de très mauvais augure si la personne qui a été infidèle ne reconnaît pas sa part de responsabilité, n’a aucune intention de changer ou ne se sent pas coupable.

Infidélité

Tromper sa femme enceinte, la pire des trahisons ? 

Vicky*, une séduisante femme de 38 ans, était enceinte de son deuxième enfant quand elle a eu de sérieux doutes sur la fidélité de son conjoint, avec qui elle venait de se marier. C’est une tierce personne qui lui a finalement confirmé cet adultère quelque temps après son accouchement. Son conjoint, lui, n’a jamais admis l’avoir trompée. Mais trois mois après la naissance de leur enfant, il l’a quittée. « Il ne m’a pas laissé le choix », dit-elle. C’était il y a sept ans.

Elle se souvient qu’il évitait les rapprochements physiques et agissait différemment par rapport à sa première grossesse. Dès le deuxième trimestre de grossesse, elle a commencé à être rongée par les doutes de la vie parallèle que menait son mari, notamment après avoir lu certains messages. « Je m’inquiétais pour mon bébé, parce que je pleurais toutes les nuits avant de m’endormir. J’avais peur que ce soit un bébé triste, qui pleure tout le temps, puisqu’on dit qu’ils sont connectés à nos émotions. Quand tu es enceinte, c’est le moment où tu es le plus vulnérable », relate-t-elle.

Il lui a fallu un an de thérapie et le passage de quelques années pour qu’elle se reconstruise. « C’était un choc et un traumatisme. J’étais comme un zombie. J’avais beaucoup maigri. J’en parlais beaucoup. J’ai traumatisé tout le monde autour de moi : des amies s’imaginaient que leur chum ferait la même chose. C’est vraiment la pire des trahisons et ça va probablement toujours rester en moi », raconte-t-elle.

Quand le manque l’emporte

Selon le psychologue américain Robert Rodriguez, auteur du livre What’s Your Pregnant Man Thinking ?, 10 % des hommes trompent leur femme enceinte, rapportait le Daily Mail. Le psychologue François St Père, spécialisé en thérapie de couple, avance même que, d’après certaines recherches, « les taux d’infidélité seraient plus importants lors de la grossesse ou juste après la naissance de l’enfant, parce que les hommes se sentiraient plus négligés par leur conjointe sur le plan des besoins affectifs, émotionnels et sexuels », explique-t-il. D’autres facteurs peuvent aussi expliquer ce comportement, comme la peur de l’engagement ou une baisse de désir envers sa conjointe.

21,7%

Taux d’adultère au Canada (23 % des hommes seraient infidèles contre 19 % des femmes)

Source : étude menée par l’Université de Guelph, en Ontario, et publiée dans la revue Archives of Sexual Behavior (2011)

Si l’infidélité durant une grossesse est particulièrement réprimée socialement, cela n’empêchera pas quelqu’un de sauter la clôture, souligne François St Père, auteur du livre L’infidélité – Un traumatisme surmontable. « La plupart du temps, les humains sont capables de se comporter selon leurs valeurs. Mais quand tu es dans une relation qui ne répond plus à tes besoins, ce n’est pas la morale et les principes qui vont guider tes comportements. Que l’autre soit enceinte, en dépression ou ait le cancer. C’est le manquement, le besoin, la carence qui va guider le comportement », explique-t-il. 

Tout le monde sait que ce n’est pas correct de tromper sa conjointe enceinte, y compris la personne qui le fait, mais au bout du compte, ce n’est pas cette idée qui prendra le dessus, souligne-t-il. Son conseil : avoir une discussion honnête avec son ou sa partenaire lorsqu’on ressent une insatisfaction dans son couple.

Surmontable ?

« Pour la grande majorité des femmes, se faire tromper enceinte, c’est épouvantable. Parce que dans la croyance populaire, c’est l’inverse qui devrait se passer : on devrait vivre la grossesse ensemble dans notre bulle et vivre ce moment magique de façon très rapprochée », indique le psychologue. Or, dans la réalité, la grossesse n’est pas toujours synonyme de lune de miel.

Et certaines blessures sont plus traumatisantes que d’autres. Se retrouver seule avec un bébé naissant, comme ce fut le cas de Vicky, « c’est une des pires situations », reconnaît-il. « Il y a l’élément de trahison, mais ce qui bouleverse encore plus, c’est d’être laissé dans un contexte où on a absolument besoin de cette personne-là », analyse François St Père.

Si Vicky a longtemps mis une croix sur une vie de couple, aujourd’hui, elle est épanouie dans une nouvelle relation amoureuse. Et les craintes qu’elle avait par rapport à son enfant ? « Il est tout le contraire de ce que je pensais. C’est un petit garçon empathique, qui a plein d’amis et un beau caractère. Quand je le regarde, je suis fière de lui, confie-t-elle. J’ai tout vécu avec mes enfants. J’ai pu être forte à cause d’eux. Je m’en suis sortie à cause d’eux. Ce sont mes petits sauveurs. »

* Nom fictif. Pour des raisons familiales, la personne a voulu taire son nom.

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