la fabrique des monstres

Des monstres nés du métal québécois

Les formes extrêmes de heavy métal ont quelque chose d’épeurant, en particulier ces voix d’outre-tombe qui sortent de la gorge de femmes et d’homme pourtant bien vivants. Ces chanteuses et chanteurs rompus au death métal se sont trouvé un nouveau terrain de jeu : ils donnent une voix aux créatures maléfiques de films ou de jeux vidéo. Regroupés depuis deux ans au sein de La Fabrique des monstres, ils ont lancé cette semaine un site internet étoffé afin d’attirer l’attention des décideurs de l’industrie.

La Fabrique des monstres n’est pas une agence d’artistes, précise d’emblée Sébastien Croteau, l’un des instigateurs du projet. « Ce qu’on voulait, c’était d’offrir un seul lieu où cliquer aux compagnies de jeux ou de films qui veulent des voix de monstres – trolls, zombies, ogres, etc. », explique-t-il. L’idée du site était, par ailleurs, de mettre tous les artistes vocaux sur un pied d’égalité (même genre de photo, CV professionnel uniformisé, etc.), afin que les intéressés ne s’attardent qu’à ce qui compte : ce que l’un ou l’autre peut faire avec son organe vocal.

« On ne fait pas vraiment d’argent avec la musique métal au Québec, sauf exception. C’est pour ça qu’on ne voulait pas arriver avec une agence, des contrats, faire signer un paquet d’affaires à tout le monde et prendre un pourcentage. »

— Sébastien Croteau, chanteur du groupe Necrotic Mutation depuis près de 30 ans

La Fabrique des monstres est une plateforme de mise en valeur, pas un business.

Du métal aux monstres

Sébastien Croteau a fait la transition vers les jeux vidéo il y a environ 15 ans et a participé à diverses productions d’Ubisoft (Assassin’s Creed, Prince of Persia, etc.), d’Eidos (Tomb Raider) et d’autres studios. Il a développé sa polyvalence au fil du temps et aussi ses aptitudes d’improvisateur, puisqu’il doit parfois inventer des langues et des formules magiques pour interpréter toute une galerie de personnages effrayants. Necrotic Mutation, comme plusieurs autres groupes métal, a de toute façon l’habitude de jouer bien plus que de la musique sur scène.

« À peu près tout le monde dans le groupe de gens avec qui on travaille fait bien plus que juste jouer des tounes sur scène, observe-t-il. C’est très théâtral comme approche et c’est clair que ça vient nous aider [pour faire des personnages dans des jeux]. » La grande différence, selon lui, est que les chanteuses et les chanteurs doivent accepter de devenir un outil au service d’un autre univers que le leur.

Un atout technique

L’autre grand atout des artistes vocaux issus du death métal, c’est la technique. « La plupart des acteurs ou artistes vocaux qui ne sont pas spécialisés en métal que je connais, si on leur demande de crier pendant 5 ou 10 minutes, ils se fatiguent la voix très rapidement », dit-il. Habitués à donner des concerts d’au moins une heure, les artistes métal, eux, peuvent soutenir des séances d’enregistrement bien plus longues.

« L’avantage qu’on a, c’est une technique vocale particulière, travaillée sur des années, insiste Sébastien Croteau, qui enseigne le chant guttural et pratique aussi le chant de gorge tibétain. On est capables de produire des sons effrayants de façon distortionnée de façon naturelle, sans logiciels pour modifier la voix. »

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