Les tunnels du métro
Le prolongement de la ligne bleue du métro de Montréal a été promis – et même annoncé – à plusieurs reprises au cours des dernières décennies. Il paraît que cette fois, c’est la bonne : cinq nouvelles stations seront ajoutées entre celle du boulevard Saint-Michel et le centre commercial Les Galeries d’Anjou. Inutile de retenir son souffle : ce segment n’entrera pas en fonction avant 2026.
« Dans l’île de Montréal, la plupart des stations et des tunnels ont été creusés dans le calcaire », explique Robert Corthésy, professeur à Polytechnique Montréal. Ce calcaire est une roche résistante et de bonne qualité, qui n’est toutefois pas très difficile à percer et à excaver. « Une roche résistante, ce n’est pas un problème, assure-t-il. C’est même un avantage : une roche de moins bonne qualité pourrait être moins stable et s’effondrer.
« Le calcaire de Montréal a plus de 400 millions d’années. Si vous observez les roches, vous allez voir qu’elles sont grises et qu’il y a de petits coquillages dedans. Ce sont des fossiles qui datent de 400 millions d’années. »
— Pierre Thouin, ingénieur géologue, chargé de cours à l’École de technologie supérieure
Bien que l’essentiel des tunnels ait été creusé directement sous terre, certaines portions ont été construites après des excavations à ciel ouvert. C’est-à-dire que des rues complètes ont été creusées pour bâtir la structure des tunnels. « Ç’a été le cas surtout sur la ligne verte au centre-ville et sur la ligne orange, près du Vieux-Montréal. La rue Berri a été très excavée près du centre-ville », ajoute François Chamberland, directeur de l’ingénierie et des projets majeurs à la Société des transports de Montréal (STM).
L’essentiel du réseau du métro actuel a été construit à l’aide d’une technique appelée « forage sautage ». Elle consiste en la séquence suivante : il faut percer des trous dans la roche, les remplir d’explosifs, les faire sauter et ensuite évacuer les débris. « On appelle ça une volée, explique Pierre Thouin. Les bonnes entreprises sont capables de faire trois volées de trois mètres par jour environ. » Ça, c’est quand le roc est beau. S’il est moins stable, l’avancée est plus lente.
Engrais et gazole
Les explosifs utilisés dans la méthode de forage sautage sont un mélange d’engrais et de gazole appelé ANFO. « C’est un agent très puissant, mais très peu sensible », explique Robert Corthésy. Ce type d’explosif ne menace pas de sauter par accident. « Ce n’est pas un bâton avec une mèche comme on voit dans les films, poursuit-il. On perce un trou, on le remplit avec des agents de sautage après avoir mis les amorces et les détonateurs. » Pierre Thouin ajoute que, pour limiter les vibrations, les charges sont programmées pour exploser l’une après l’autre avec des microdélais.
La profondeur moyenne des tunnels du métro est de 20 à 25 m, selon la STM. Parfois, un peu plus. « L’une des raisons pour lesquelles le métro descend un peu plus profondément, c’est qu’une fois passé les 30 à 40 premiers mètres, le roc est plus sain à Montréal », dit Pierre Thouin. Plus en surface, la roche risque d’être plus fissurée, parce qu’elle a été écrasée par les centaines de mètres de glace qui recouvraient le sud du Québec il y a environ 100 000 ans.
François Chamberland précise qu’en direction de Côte-Vertu, après la station Lionel-Groulx, les tunnels sont plus profonds qu’ailleurs. Le relief de la ville remonte à partir de ce point et, comme les rames de métro ne peuvent pas monter de très grosses pentes, il a fallu aller plus en profondeur. Ces pentes expliquent en partie pourquoi notre métro roule sur des pneus d’azote : ces pneus lui permettent de grimper des pentes plus abruptes que des roues de métal.
« Entre certaines stations, le tracé des tunnels va en descendant en sortant de la station et remonte à l’approche de la suivante », explique Robert Corthésy. La pente descendante fait en sorte qu’au départ, le train consomme moins d’énergie et qu’à l’arrivée en station, la remontée contribue à le ralentir et à ménager les freins.