Pont Champlain

La silhouette prend forme

La partie haubanée du nouveau pont Champlain, celle qui en fera sa signature visuelle, prend forme. La Presse a eu accès à cette partie hautement technique du chantier, où l’ingénierie de pointe laisse peu de marge d’erreur aux ouvriers.

Le coffrage du pylône

Les automobilistes qui empruntent le vieux pont Champlain auront certainement remarqué les deux immenses boîtes de contreplaqué qui coiffent le pylône central du nouveau pont. « Chaque boîte est une petite usine, divisée en trois parties », résume Frédéric Guitard, directeur de la section à hauban pour le consortium Signature sur le Saint-Laurent. La partie du haut du coffrage est essentiellement une plateforme de travail circulaire, au milieu de laquelle des ouvriers installent d’immenses armatures d’acier, hautes de 6 m, pesant un peu plus de 20 tonnes. Une fois ces cages installées – une étape délicate nécessitant la plus grande précision – la boîte de coulage se hisse vers le haut pour coffrer le ciment, et 120 m3 de béton est coulé dans l’armature, formant un nouvel étage du pylône. Le cycle complet de bétonnage, 6 m à la fois, est de 10 à 12 jours. « On visait un cycle de 15 jours au départ, mais le procédé a été amélioré de façon importante », indique M. Guitard.

Plus large que le vieux pont

Le pylône culminera à 170 m au-dessus du Saint-Laurent. Environ 130 m sont jusqu’à maintenant complétés. Tout en haut, on remarque très bien à quel point le nouveau pont est plus large que l’ancien pont Champlain. Avec trois voies dans chaque direction, les accotements, une piste cyclable et piétonnière et la voie centrale réservée au futur REM, la nouvelle structure a 60 m de largeur, contre 24 m pour son prédécesseur.

Haubans bons pour 40 ans

Les haubans ne sont pas qu’esthétiques. Ce sont eux qui soutiendront entièrement la section du pont qui surplombera la Voie maritime du Saint-Laurent, où il est impossible de poser des piliers à cause du trafic de navires. Chaque hauban est composé de 127 torons, constitués d’une tige centrale entourée de sept fils d’acier torsadés, le tout enrobé de graisse protectrice dans une gaine de PVC. « Ces torons ont une durée de vie utile de 30 ou 40 ans », précise M. Guitard. Chacun pourra être changé ou réparé de façon indépendante. Le pont est conçu pour résister au bris accidentel de plusieurs de ses haubans.

La « partie cachée du monstre »

Le pont haubané est divisé en deux parties. La section montréalaise, appelée la « travée arrière », est plus courte, et ses poutres sont lestées de 19 000 m3 de béton coulé, pour faire contrepoids à la section côté Rive-Sud, qui surplombera la Voie maritime. Les deux sections se supporteront mutuellement grâce aux 30 haubans fixés en hauteur sur le pylône. Côté montréalais, les ouvriers en sont à couler le béton du tablier du pont. « En dessous, c’est la partie cachée du monstre », lance M. Guitard. On y découvre des dédales de coursives, qui contiennent tout l’équipement technique de l’ouvrage – câbles électriques, système d’évacuation d’eau, accès d’entretien – et des tonnes de béton nécessaire au lestage.

Étapes complexes côté Rive-Sud

Du côté Rive-Sud du pylône, où le tablier sera suspendu au-dessus de la Voie maritime, 15 segments préfabriqués de 12,5 m de long sur 60 m de large (appelés « voussoirs ») doivent être hissés par un système complexe nécessitant plusieurs puissantes pièces d’équipement. Chacun de ces segments prend quatre semaines à préparer, et deux semaines à installer.

« À ce stade, toutes les méthodes spécifiques développées pour la construction de ce pont, tous les systèmes de levage et plateformes de travail ont été testés et mis à l’épreuve, indique Frédéric Guitard. On sait que le pont est constructible. On n’a jamais eu ce que j’appelle un oh-shit-moment, un point où on bloque parce qu’on se rend compte qu’on s’est trompés. Maintenant que tout fonctionne, nous entrons en phase de production », explique l’ingénieur. Actuellement, environ 1100 travailleurs sont à l’œuvre sur le pont, incluant les sous-traitants.

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