Photoreportage

Défiant la crise, le jazz international a fait vibrer Port-au-Prince

Le festival international de jazz de Port-au-Prince, la fin de semaine dernière, a été une bouffée d’oxygène prisée en Haïti, en proie à une crise sociopolitique. Le PaP Jazz, comme le surnomment ses habitués, a gagné sa place dans l’agenda international à l’heure où les capitales mondiales du genre musical grelottent sous des températures négatives. Mais cette 14e édition aura été la plus complexe à mettre en œuvre.

«  On a changé la grille de programmation 15 fois. Ç’a été très très compliqué, mais on ne s’est jamais une seconde dit qu’on ne faisait pas ce festival, jamais une seconde  », confie Milena Sandler, directrice de la fondation Haïti Jazz, organisatrice du festival.

Les mois de préparation nécessaires pour assurer la venue en janvier de stars internationales ont été court-circuités par la crise sociopolitique, l’année 2019 étant marquée par des semaines de contestations anticorruption, des manifestations émaillées de violence aboutissant même à une paralysie totale des activités de septembre à décembre.

Licenciements massifs d’employés et même fermetures définitives d’établissements, la crise subie par les entreprises privées a largement déteint sur le festival. «  On a trois partenaires traditionnels qui ont définitivement dit que c’était impossible pour eux de participer financièrement cette année, rapporte Milena Sandler. On les comprend, on ne jette la pierre à personne.  »

Pour pallier ce budget amputé, l’équipe du PaP Jazz a alors pensé à lancer une campagne de financement participatif sur l’internet. Un pari gagnant, car plus de 10 000 dollars américains ont été récoltés, permettant d’aligner une programmation au niveau des grands festivals mondiaux.

Bonheur partagé : en ouverture, les mélomanes haïtiens ont profité de l’énergie de la légende Dee Dee Bridgewater qui aspirait depuis des années à visiter Haïti. «  Bien sûr, ce pays a besoin d’écoles. Bien sûr, il y a un besoin pour des infrastructures plus fortes, mais la musique, c’est très important. Ça donne aux gens d’Haïti la possibilité de voir et d’écouter de la musique qui vient d’un peu partout et ça peut ouvrir les yeux des gens à l’extérieur », espère Dee Dee Bridgewater.

Loin du cliché élitiste du jazz, 80 % des concerts du festival de Port-au-Prince sont gratuits et, tous les matins pendant une semaine, les artistes internationaux offrent des ateliers à tous ceux qui veulent y assister. De la Cubaine Yilian Canizares au Français Jacques Schwarz-Bart, nombre d’artistes à l’affiche de cette 14e édition n’en étaient pas à leur première participation. 

— Agence France-Presse

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