Nous ne vendrons pas, assure Louis Audet
Pour la première fois de son histoire, Cogeco aura un PDG qui ne se nomme pas Audet.
Après 25 ans comme grand patron de Cogeco et Cogeco Communications, Louis Audet cédera en septembre son poste de président et chef de la direction à Philippe Jetté, président de Cogeco Peer 1, la division de centres de données. Mais pas question pour la famille Audet de vendre son bloc d’actions majoritaires et, par conséquent, de céder le contrôle de Cogeco. « La famille Audet est déterminée à contrôler l’entreprise, à laisser croître l’entreprise. C’est un engagement que je veux réitérer », a dit Louis Audet, hier, en conférence de presse.
C’est un secret de Polichinelle que Rogers, qui détient 40 % des actions ordinaires de Cogeco cotées à la Bourse de Toronto, aimerait faire l’acquisition de Cogeco depuis des années. Sauf que la famille Audet, qui a fondé Cogeco, détient 70 % des droits de vote grâce à ses actions à vote multiple.
Le « monde imaginaire » des analystes
Au fil des ans, les analystes financiers se sont souvent interrogés sur la possibilité d’une vente à Rogers, et hier n’a pas été une exception. Dans une note, l’analyste Aravinda Galappatthige (Canaccord Genuity) estime qu’une vente de Cogeco n’est pas « imminente », mais il voit là un « scénario irrésistible à long terme ».
Ce scénario est rejeté du revers de la main par Louis Audet. « Ces analystes vivent dans un monde imaginaire. Notre entreprise n’est pas à vendre, ce n’est pas notre intention », dit M. Audet.
Questionné sur l’investissement de Rogers dans Cogeco, M. Audet rappelle que « c’est un investissement passif, [il] [n’est] pas sûr que c’est un emploi optimal du capital, mais c’est leur décision ».
Nouveau PDG, même stratégie
L’arrivée de Philippe Jetté à la tête de Cogeco ne changera pas la stratégie et les priorités de l’entreprise, ont indiqué M. Audet et M. Jetté, hier, en conférence de presse.
« C’est une continuité. Louis et moi avons travaillé depuis plusieurs années à établir la stratégie actuelle. La stratégie ne change pas, les équipes de direction restent telles qu’elles sont », dit Philippe Jetté.
Le 1er septembre, Louis Audet deviendra président exécutif du conseil d’administration de Cogeco et Cogeco Communications. À ce titre, il entend épauler Philippe Jetté dans ses nouvelles fonctions pendant environ trois ans – ensuite, M. Audet gardera la présidence du conseil d’administration.
M. Audet, qui aura 67 ans ce printemps, avait indiqué il y a deux ans au conseil d’administration vouloir se retirer des opérations de l’entreprise à 70 ans (pour ne rester qu’au C.A.). L’annonce d’hier permet de faire une « transition ordonnée » de trois ans, dit-il.
« Nul d’entre nous n’est éternel », dit Louis Audet.
« Il faut reconnaître qu’à un certain moment, c’est le temps de passer le flambeau. Le temps est opportun pour le faire. […] Ça renouvelle la direction, ça amène une énergie neuve et du sang neuf. »
— Louis Audet
Outre Louis Audet, aucun autre membre de la famille Audet ne travaille chez Cogeco. Il n’y a donc pas eu de candidature issue de la famille Audet pour succéder à Louis Audet. Le conseil d’administration a étudié uniquement des candidatures de l’interne avant d’arrêter son choix sur Philippe Jetté, qui dirige la division de centres de données (Cogeco Peer 1) depuis 2015. Ingénieur de formation, M. Jetté est chez Cogeco depuis 2011. Auparavant, il avait travaillé en téléphonie sans fil chez Bell.
Parmi ses premières décisions à la tête de Cogeco, Philippe Jetté devra justement trancher si l’entreprise se lance dans la téléphonie sans fil (Ottawa tient actuellement des enchères du spectre). « On va s’assurer de le faire d’une façon qui nous permet de faire de l’argent, ou bien on s’abstiendra », dit Louis Audet.
En câblodistribution, M. Audet n’a pas caché son intérêt pour que Cogeco continue de faire des acquisitions aux États-Unis, après celles d’Atlantic Broadband (1,36 milliard US) en 2012 et de MetroCast (1,4 milliard US) en 2017. Auparavant, Cogeco devra toutefois réduire son ratio d’endettement de 3,6 à 3,0 fois ses profits, a-t-il indiqué.
« Je ne suis pas un politicien »
Que ce soit la montée du populisme, l’éducation ou encore l’importance de l’immigration, Louis Audet n’a jamais caché son intérêt pour le débat public au cours des dernières années.
Il est toutefois catégorique : il ne prépare pas son entrée en politique aux prochaines élections provinciales. « Absolument pas, dit M. Audet. Je ne suis pas un politicien, ce n’est vraiment pas dans mes ambitions. Je vous le confirme de façon indubitable. »
Louis Audet a l’intention de « promouvoir certaines causes », comme « [sa] conviction profonde que ce pays [le Canada] pourrait accueillir plus d’immigrants ». Il estime qu’avec une immigration accrue, le Canada (36 millions de personnes) pourrait avoir la taille de la France (67 millions) ou de l’Italie (60 millions).