Les hostilités montent d’un (autre) cran
Donald Trump a déclaré jeudi qu’il ne participerait pas à un débat virtuel avec son adversaire démocrate Joe Biden, le 15 octobre prochain. Les démocrates ont répliqué en fin de journée en annonçant qu’ils allaient présenter une loi afin qu’une commission enquête sur les capacités à diriger du président des États-Unis.
L’annonce du président faisait suite à une décision de la commission indépendante chargée d’encadrer les débats présidentiels, dévoilée plus tôt en matinée. L’organisation a précisé que le débat du 15 octobre aurait lieu, mais que les deux candidats se tiendraient « dans des lieux séparés » et « à distance ».
La commission a justifié sa décision en précisant qu’elle vise « à préserver la santé et à garantir la sécurité de tous les participants ».
« Je ne pense pas être contagieux du tout », a affirmé M. Trump jeudi sur les ondes du réseau Fox, tout en se moquant de son adversaire démocrate.
La confusion règne toujours cependant quant au véritable état de santé du président, qui a annoncé avoir été déclaré positif à la COVID-19 le 2 octobre. La Maison-Blanche a multiplié les informations contradictoires à ce sujet, mais le président devrait pouvoir reprendre ses activités publiques à partir de samedi, a indiqué le médecin de la Maison-Blanche jeudi.
Samedi marquera le dixième jour depuis que le milliardaire républicain a été déclaré positif, et « sur la base de la trajectoire des diagnostics avancés que l’équipe mène, je m’attends à ce que le président puisse reprendre ses activités publiques à ce moment-là sans risque », a affirmé Sean Conley dans un bref compte rendu, communiqué par l’exécutif américain.
Le président « a globalement extrêmement bien réagi au traitement », et « depuis qu’il est rentré chez lui, ses examens médicaux sont restés stables et n’affichent aucune indication selon laquelle la maladie progresserait », a-t-il aussi dit.
M. Trump lui-même a signifié qu’il envisageait de participer à un rassemblement de campagne dès samedi, possiblement en Floride.
Donald Trump souffre « d’une dissociation de la réalité qui serait amusante si elle n’était pas si meurtrière », a réagi la présidente démocrate de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, en rappelant le lourd bilan des États-Unis, pays le plus endeuillé du monde par la pandémie.
En fin de journée, Mme Pelosi a annoncé qu’elle allait présenter un projet de loi afin de créer une commission chargée d’enquêter sur les capacités du président à exercer ses fonctions.
Sur Twitter, des partisans du président ont rapidement accusé Nancy Pelosi de vouloir organiser « un coup d’État ».
Une telle loi a peu de chances d’être adoptée cependant. La manœuvre pourrait être purement symbolique afin de souligner à grands traits les déclarations et gestes du président au cours des dernières semaines.
Depuis sa sortie du Centre médical militaire Walter Reed, le promoteur milliardaire multiplie d’ailleurs les gazouillis sur Twitter, assurant qu’il a repris le travail et qu’il n’a plus aucun symptôme de la maladie.
Malgré ses efforts pour minimiser la pandémie, ses affirmations et ses déclarations inquiètent même dans ses propres rangs. Le président du Sénat, le républicain Mitch McConnell, a déclaré jeudi qu’il évitait la Maison-Blanche depuis début août en raison de ses mesures insuffisantes face au coronavirus.
« Si j’étais un stratège républicain, je souhaiterais qu’il n’y ait pas de débat ! », lance Charles-Philippe David, spécialiste de la politique américaine et président de l’Observatoire sur les États-Unis de la Chaire Raoul-Dandurand.
Selon lui, le premier débat a fait perdre des points au président sortant. Des sondages nationaux ont d’ailleurs montré un écart grandissant en faveur de Joe Biden après cette soirée, qualifiée par certains de « honte nationale ».
Mais que le président participe ou non aux derniers débats ne devrait pas avoir une grande influence sur le résultat du 3 novembre, estime M. David. Un avis que ne partage pas Rafaël Jacob, chercheur associé à la Chaire Raoul-Dandurand.
À la traîne dans la majorité des sondages nationaux et en danger dans certains États-clés qui lui étaient acquis, le président se prive d’occasions de gagner des points face à son adversaire et de rallier de nouveaux électeurs, signale M. Jacob.
Mais Donald Trump serait-il capable de changer de ton dans les deux derniers débats ? Charles-Philippe David en doute.
« Il est incapable de suivre un plan de match et n’en fait qu’à sa tête. »
— Charles-Philippe David, spécialiste de la politique américaine
En matinée, Joe Biden n’a pas voulu commenter le refus de son adversaire de participer au débat. « Je ne sais pas ce que le président va faire, il change d’avis toutes les secondes. Commenter à ce stade serait prématuré. »
Le président a d’ailleurs proposé dans la journée de tenir les deux prochains débats « en personne », soit le 22 octobre, une date qui était déjà au calendrier, et le 29 octobre afin de remplacer le débat du 15.
L’équipe démocrate a refusé sur-le-champ cette proposition, ajoutant que Joe Biden se préparait pour le dernier débat prévu le 22 octobre.
— Avec l’Agence France-Presse